vendredi 21 mars 2025

Sans retour : le film culte de Walter Hill sort du marais

Sans retour 4K Blu-ray CINEBLOGYWOOD

Ceux qui, comme moi, ont découvert Sans retour (Southern Comfort, 1981) sur une VHS empruntée au vidéoclub peuvent légitimement se réjouir de la ressortie en vidéo du film signé Walter Hill. Plus que la nostalgie, ce qui nous étreint, c'est la joie suscitée par la qualité de l'édition concoctée par L'Atelier d'images. Un must.

Au mitan des années 1970, une escouade de la garde nationale de Louisiane se retrouve dans le bayou pour participer à un vaste exercice militaire. Le groupe est composé de neuf caractères bien trempés - du filou au sociopathe, en passant par le lèche-rangers. Il y a même un nouveau, un Texan qui ne s'en laisse pas compter. Malgré les vannes et les bravades, la tension est palpable. Bien vite, la troupe se perd dans les marais. Pour rejoindre au plus vite le reste des effectifs, les neuf hommes décident d'emprunter des canoés à des Cajuns. Au milieu de la rivière, les propriétaires sortent des bois. Et tout dégénère.

Premier constat : le film est toujours aussi prenant plus de 40 ans après sa sortie en salle. Walter Hill a réussi à fusionner thriller, survival et film de guerre, tout en flirtant avec le Nouvel Hollywood. Aucune posture chez le cinéaste. Sa mise en scène, d'une redoutable efficacité, est mise au service de l'action. Et de l'action, il y en a. Elle surgit brutalement comme la gueule d'un alligator planqué dans les eaux saumâtres. Les personnages ne sont pas oubliés. Chacun des neuf salopards parvient à exister à l'écran. Ce sont des figures bien dessinées, jamais des caricatures. Ils sont interprétés par un casting d'acteurs, tous excellents, avec des "gueules", qui dégagent une sacré présence à l'écran et parfois aussi une grosse dose de testostérone - ce qui n'est pas incompatible avec une finesse de jeu. Jugez-en : Keith Carradine (Nashville, Les Duellistes), Powers Boothe (La Forêt d'émeraude, Extrême préjudice), Fred Ward (L'Étoffe des héros, Short Cuts, Remo sans arme et dangereux), T. K. Carter (The Thing), Lewis Smith (Buckaroo Banzai, Wyatt Earp, Django Unchained), Les Lannom (vu dans Roots, Dr Quinn médecin, Les Têtes brûlées, X-Files), Peter Coyote (E.T. l'extra-terrestre, Un Homme amoureux, La Rançon de la gloire), Alan Autry (vu dans Cours après moi Shérif et L'Agence tous risques), Franklyn Seales (vu dans Hill Street Blues) et Brion James (Blade Runner, 48 Heures, Mort sur le grill, Le Cinquième Élément).

Hill, qui a cosigné le scénario, ne s'embourbe pas dans la psychologie, pas plus que dans le message politique. Car évidemment, ces Américains pourchassés dans les marais par un ennemi invisible nous rappellent les militaires, les vrais, qui tentent de survivre dans la jungle vietnamienne. Dans un entretien en bonus, le cinéaste admet du bout des lèvres que le film peut évoquer la situation au Vietnam mais rejette toute idée de parabole spécialement écrite dans cet esprit. Sans retour raconte surtout une Amérique désunie et paumée. Et, évidence qui pourtant passe au second plan, nous fait découvrir un autre monde, celui des Cajuns ou Cadiens. Une communauté francophone qui semble repliée sur elle-même et dont les us et coutumes interpellent les Gardes nationaux. Génial final dans un village cadien qui a organisé une "boucherie", une fête autour de cochons fraîchement abattus. Un choc des cultures entre soulagement et méfiance, partage, entraide et explosion de violence. Montage brillant de Freeman A. Davies.

Un beau retour dans les bacs

Le film est proposé dans une magnifique version restaurée qui nous permet d'apprécier à sa juste valeur la photo désaturée d'Andrew Laszlo (Les Guerriers de la nuit, Rambo, L'Aventure intérieure) et la bande originale entêtante composée par Ry Cooder. L'Atelier d'images n'a pas mégoté non plus sur les bonus. En maître de cérémonie, Philippe Guedj, journaliste et réalisateur qui ne cache pas son admiration pour le film. Dans un entretien complet, il décrypte le film et sa production pas piquée des vers. Il interviewe également Keith Carradine, qui égrène ses souvenirs du tournage. Walter Hill livre également sa vision d'un film qui s'est planté au box-office avant de trouver son public grâce à la vidéo. Sans retour, vous pouvez y retourner sans hésitation.

Anderton


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