vendredi 6 mars 2020

J'ai perdu mon corps : la vie à portée de main

En Blu-ray et DVD : Une sélection aux Oscars, de multiples prix aux César 2020 (dont celui du meilleur long-métrage d'animation) ainsi qu'à Annecy et Cannes 2019... le moins qu'on puisse dire c'est que J'ai perdu mon corps a su séduire les critiques comme le public des festivals. Il faut dire que le film d'animation réalisé par Jérémy Clapin se distingue par son originalité et l'émotion qu'il dégage. Séance de rattrapage à l'occasion de sa sortie en vidéo.



Un jeune homme à terre, lunettes cassées, couché dans une mare de sang. Sa main droite, coupée de son avant-bras. Les doigts s'agitent. Simple réflexe ? Non, les voici qui s'animent. La main semble prendre vie, tandis que celle de son propriétaire défile par flashbacks devant nos yeux. Souvenirs d'une jeunesse dans un pays lointain, d'une tragédie, d'une histoire d'amour. Souvenirs interrompus par le périple de la main qui, tel une grosse araignée de chair, traverse la ville et tente d'éviter pièges et dangers. Pour aller où ?


Etonnant récit, que Guillaume Laurant a coécrit avec le réalisateur d'après son propre roman, Lucky hand. Il mêle plusieurs lignes de temps qui, comme les lignes de la main, s'évitent et finissent par se croiser. Pour autant, le spectateur n'est jamais perdu, à peine décontenancé pour peu qu'il accepte le principe du film ; il se laisse porter par l'histoire, tout comme le membre tranché dont le parcours empreinte des chemins bien chaotiques - les toits, le pavé, les souterrains, les flots d'une rivière, les conduits d'immeubles...

Au-delà de cette étrange pérégrination, J'ai perdu mon corps nous raconte l'histoire de Naoufel, un jeune homme au destin atypique. Un anti-héros, un type ordinaire. Un livreur de pizza comme on en croise souvent sur les routes. Sa gaucherie est touchante ; son parcours de vie, poignant. Jérémy Clapin parvient à mettre en scène une histoire d'amour à la fois ancrée dans le réel (et même l'actualité) et portée par un souffle fantastique. Morceaux de bravoure et moments délicats, quasi oniriques, coexistent harmonieusement grâce à une mise en scène et un montage inspirés. La partition de Dan Levy (également primée aux César), tantôt urbaine, tantôt éthérée, joue également beaucoup dans la réussite du film.  


Sony Pictures Home Entertainment complète l'édition vidéo par un making of, qui revient sur la production du film et notamment l'animation, qui mêle techniques de dessin traditionnel et 3D. D'où un rendu original, qui donne "de la matière" aux personnages et aux décors tout en permettant de réaliser des plans pleins de vie et de mouvements. La vie, dans ce qu'elle a de plus beau et de plus fragile.

Anderton

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