En DVD et Blu-ray : Encore une belle trouvaille d'Elephant Films ! Réalisé par Jeremy Kagan, Héros (Heroes, 1977), avec Henry Winkler, Sally Field et Harrison Ford, est l'un des premiers films américains à évoquer le sort des vétérans du Vietnam et les troubles psychologiques qui les accompagnent. Et pour autant, il s'agit d'une comédie, dont la légèreté laisse peu à peu la place à une ambiance grave, jusqu'à un final étonnant.
Jack (Henry Winkler) est atteint de trouble de stress post-traumatique depuis son retour du Vietnam. Avec l'argent d'autres vétérans, il a le projet de monter un élevage de vers de terre et de rejoindre un ancien membre de son unité qui vit désormais en Californie. Il parvient à s'échapper de son hôpital new-yorkais et se retrouve dans le même bus que Carol (Sally Field), qui doit se marier dans trois jours. Entre disputes et galères, ce duo improbable traverse les Etats-Unis ensemble et fait une étape chez Ken (Harrison Ford), ex-compagnon d'armes de Jack et lui aussi bien amoché.
Jeremy Kagan nous embarque dans une comédie qui oscille entre le road trip et le buddy movie. Jack est un doux dingue et Carol, un peu paumée. Le comportement instable du premier provoque des incidents, voire quelques catastrophes dont la future mariée fait les frais. Mais le binôme tient bon. On rit de leurs déboires. Henry Winkler, qui incarne alors sur le petit écran le maître du cool, à savoir Le Fonz aka Fonzie dans Happy Days, choisit le contre-emploi total en campant un homme fragile, peu sûr de lui et maladroit. Dans un bonus très éclairant, le critique Laurent Aknin, à qui l'on doit des bons livres sur la mythologie Star Wars et les mythes du cinéma américain, fait remarquer que Winkler manque de charisme alors qu'il est la tête d'affiche. C'est vrai, même si son interprétation est touchante et rend son personnage attachant. Ce Pierrot lunaire laisse progressivement remonter ses failles et blessures, Winkler révèle alors la gravité de sa pathologie jusqu'à la séquence finale, très originale, où la souffrance de Jack explose littéralement à l'écran. Une sorte de pré-Rambo.
Reste qu'Aknin a raison de souligner que la performance de Winkler est surtout éclipsée par celles de deux futures grandes stars : Sally Field et Harrison Ford. L'actrice est craquante ; à l'aise dans les scènes de comédie, elle dévoile toute la profondeur de son jeu dans des scènes plus intimes. Quant à Harrison Ford, il offre une prestation intéressante : sa bogossitude s'efface rapidement pour mettre à jour un ancien soldat revenu brisé de la guerre. Le film est tourné avant Star Wars mais sort après la saga interstellaire. Une légende est née. Quant à Sally Field, elle va s'imposer deux ans plus tard dans Norma Rae (1979), de Martin Ritt, et récolter une pluie de récompenses, de Cannes aux Oscars en passant par les Golden Globes. La carrière cinématographique d'Henry Winkler restera pour sa part anecdotique.
Etonnante comédie donc qui, à l'instar de ces interminables voyages en bus, connaît parfois des petits coups de mou et fait quelques sur place. Mais comme le fait remarquer très justement Laurent Aknin, le film est précurseur : c'est l'un des premiers à aborder frontalement la guerre du Vietnam et ses conséquences. Et c'est l'un des derniers à faire partie du Nouvel Hollywood. Il est déjà marqué par la reprise en main des studios, sans tomber tout à fait dans la recette hollywoodienne. C'est donc une belle découverte qu'Elephant Films nous propose dans une version restaurée et accompagnée d'un livret.
Anderton
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