A lire : Comme bon nombre de cinéphiles j'imagine, j'ai entendu parler de Roscoe "Fatty" Arbuckle sans avoir vu aucun de ses films. Cette immense star hollywoodienne fut au coeur d'un retentissant scandale sexuel qui impliqua la mort d'une jeune femme. Julien Frey et Nadar nous racontent son histoire dans un bon et beau roman graphique intitulé Fatty le premier roi d'Hollywood (Futuropolis).
Les auteurs nous entraînent dans un récit digne d'un film hollywoodien. Sur le plateau de la série The Twilight Zone (La Quatrième dimension, chez nous), un assistant se fait passer un savon par un ponte de l'équipe. S'il ne ramène pas Buster Keaton pour un essai lumière, il sera viré. Le jeune homme se rend dans la loge du comique au visage impassible et désormais sexagénaire. Lequel préfère terminer la lecture de son journal et propose en échange de raconter l'histoire de son ami Fatty. "Une certaine Amérique l'a envoyé en enfer", lâche-t-il avant de dérouler son histoire.
Au fil des 200 pages, on découvre qui est vraiment Arbuckle. Immense star dans les années 1910, c'est un comique qui jouait de son physique XXL, généreux avec ses amis (il lancera la carrière de Buster), amateur de grosses blagues, fêtard invétéré, accro à l'héroïne. En 1921, lors d'une folle fiesta de trois jours, une jeune femme est prise de douleurs dans la chambre du comédien. Elle finira par décéder. La presse se déchaîne : en pleine Prohibition, Fatty incarne l'immoralité qui règne à Hollywood. Son procès, ou plutôt ses trois procès seront retentissants alors que les ligues de vertu exigent de purger les films de toute scène de violence et de sexualité. Le code Hays s'impose et Arbuckle devient persona non grata à Los Angeles.
Frey et Nadar nous transportent à l'époque où les studios imposaient leur loi à des artistes qui travaillaient à la chaîne tout en inventant un art nouveau. Fatty profite du système avant d'en devenir une victime. Son innocence n'y changera rien. Sacrifié, blacklisté, Arbuckle terminera sa carrière dans une semi-clandestinité, sous un faux nom, grâce au soutien de Buster Keaton notamment. Ce bel album de BD se dévore d'une traite tant les auteurs excellent à lever le voile sur l'envers du décor tout en soignant le développement des personnages et la mise en scène d'un récit implacable et prenant.
Anderton
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