En salles : "Tous les flics sont des bâtards." Non, ce n'est pas une réplique tirée des Kaïra mais la traduction du sous-titre anglais d'un putain de film italien : All Cops Are Bastards. Soit le titre acronymique (ta mère) : ACAB. L'expression a été inventée par les skinheads british dans les années 1970 avant de servir de cri de ralliement aux hooligans et émeutiers en tous genres. ACAB, qui sort en salles le 18 juillet, s'intéresse au quotidien d'un groupe de CRS italiens qui accueille une nouvelle recrue.
Il n'y a pas plus haïs que les CRS (celerini, en Italie). Ils sont pris pour des brutes épaisses sans cervelle. Or, ACAB, tiré du roman éponyme de Carlo Bonini (non publié en France), s'intéresse aux hommes sous les casques. Des mecs payés une misère pour se faire insulter et cracher à la gueule, sans rien dire, stoïques,
jusqu'à ce qu'un ordre les autorise à libérer leur rage et à balancer des
coups de matraque sur tout crâne qui passe à leur portée. Qu'ils aient la haine de l'immigré ou la nostalgie du fascisme, qu'ils tentent de préserver leur famille fissurée ou qu'ils s'accrochent à de nobles idéaux, ce sont des paumés qui ne comprennent plus la société pour laquelle ils sont censés faire respecter l'ordre. Une société dans un bien sale état, rongée par la violence, la pauvreté et l'incurie des politiciens.
Ni héros, ni salauds
Stefano Sollima, le réalisateur (qui a oeuvré sur la série Romanzo Criminale), a choisi de ne pas porter de jugement. Les personnages sont loin d'être des caricatures : tantôt attachants, tantôt révoltants, parfois flippants, les CRS ne laissent pas le spectateur indifférent. On s'indigne, on est choqué, on se laisse parfois embarquer par des sentiments équivoques avant de s'en vouloir pour finir par se poser des tas de questions. Sans forcément trouver de réponses.
Le film donne à réfléchir tout en respectant les codes du genre policier. Pas de rythme mort, des situations tendues - à la sortie des stades comme dans les foyers. La rage, partout. Jusque dans la bande-son rock, punk, rebelle.
Perso, je me suis pris un bon coup de tonfa dans le plexus. Voici un film intelligent, engagé, brillamment servi par un metteur en scène inspiré et des comédiens toujours justes, dévoués au collectif - mention spéciale à Pierfrancesco Favino (Le Libanais dans Romanzo Criminale, le film). Décidément, le polar est un genre qui réussit bien au cinéma transalpin. Le prix Sang Neuf reçu au festival de Beaune 2012 est tout à fait mérité.
Retrouvez la semaine prochaine sur Cineblogywood l'interview du réalisateur Stefano Sollima
Anderton
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire