mercredi 4 juillet 2012

Schizophrenia : vol au-dessus du nid d’un coucou autrichien


En DVD : Décidément, la vie n’est pas un jardin de roses au royaume de Sissi et des coucous ! A propos de l’Autriche, on connaissait les radiographies sans concession de Michael Haneke – Funny Games - et d’Ulrich Seidl – Import, export. Et moins celle établie par leur compatriote Gerald Kragl en 1983, que réédite luxueusement Carlotta en DVD et BluRay. Bénéficiant d’un statut de film-culte en raison de son sujet – 24 heures dans la tête d’un tueur psychopathe entré par effraction dans un pavillon dont il massacre les occupants – de son statut – unique film d’un Autrichien et qui fut interdit de diffusion dans de nombreux pays, dont la France - Schizophrenia a de quoi provoquer un choc esthétique radical pour ceux qui ne l’ont pas encore vu.

 
Culte et traumatisant

Uniquement centrée sur le personnage du tueur, la narration épouse ainsi les bouffées délirantes et incontrôlables de son personnage central. Impression renforcée par une utilisation magistrale de la voix off, sorte de contre-point tout aussi délirant aux agissements de son principal protagoniste.

A ceci s’ajoute le travail sensationnel du chef opérateur Zbigniew Rybczynski. D’une inventivité constante, multipliant les contre-plongées à ras du sol – notamment une scène de couloir nocturne qui rappelle à 100% Irréversible de Gaspar Noé, lequel témoigne dans un bonus de sa dette envers le film autrichien – ou les angles obliques, la réalisation renforce le sentiment de claustration et de malaise. Sentiment renforcé par les multiples plans filmés au harnais fixé sur l’acteur principal. Ou par le travail effectué autour du son, autre contre-point délirant et clinique de la folie meurtrière du personnage – comme le bruit interminable de ces gouttes d’eau s’échappant d’un robinet

Teckel et dentier

Huis clos claustrophobique, sentiment de malaise glaçant, d’une audace et d’une inventivité hallucinantes, le film s’offre néanmoins de véritables échappatoires grinçantes : soit en portant le regard sur un teckel, témoin des involontaire des meurtres du protagoniste, soit en s’attachant à des détails incongrus, comme un dentier échappé de la mâchoire d’une victime.

A la fois retranscription visuelle sans concession d’une folie à l’oeuvre, véritable prouesse technique de réalisation, Schizophrenia rappelle aussi bien les cultes Eraserhead (1978) pour son audace plastique et sonore, C’est arrivé près de chez vous (1993) pour son alliance de comique involontairement grinçant et sa description pavillonnaire sanglante, que le méconnu Clean,Shaven (Lodge Kerrigan, 1995), pour son parti pris radical d’adopter le point de vue d’un schizophrène.

OVNI dans la galaxie cinéma
Toujours aussi traumatisant, Schizophrenia n’a rien perdu de sa réputation et de son culte 30 ans après sa sortie. Un sempiternel OVNI dans la galaxie cinéma et dont les très riches bonus – interview de Gaspar Noé, entretiens avec le réalisateur Gerald Kragl et son chef op Zbigniew Rybczynski  - rendent compte de la ferveur dont il est, à juste titre l’objet.

Travis Bickle

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