A voir : Moah, l'une des séries les plus originales depuis un bail, est diffusée à partir d'aujourd'hui sur OCS. Le protagoniste, qui a donné son nom à la série, vit dans une caverne il y a 45.000 ans. Une immersion sensorielle dans la préhistoire, sans dialogues ni musique. Ou presque. Et c'est une belle réussite.
Je fais partie d'une génération qui a découvert La Guerre du feu lors de sa sortie en salle. Notre classe de cinquième s'était alors enflammée à la vision de nos ancêtres affrontant des tigres aux dents de sabre ou s'initiant aux joies de la levrette en plein air. Quel choc ! L'influence du film de Jean-Jacques Annaud sur Moah est manifeste : les créateurs Benjamin Rocher, Bertrand Soulier et Henri Debeurme ont choisi une approche tout aussi "réaliste", dans laquelle les personnages s'expriment dans une langue gutturale, dont on finit par comprendre les quelques mots de base. Belle idée : les pensées (simples) et souvenirs des hommes des cavernes sont matérialisés par des images au format carré. Le récit est limpide et, passée la surprise des premières minutes, les personnages nous font oublier qu'ils sont des êtres primitifs. Jamais caricaturaux, ils affirment leur caractère... et leur humanité. Le talent des comédiens fait passer toute une gamme d'émotions, qui se révèlent de plus en plus complexes.
Casting et ton uniques
Tigran Mekhitarian campe un Moah plein de douceur. Ses expressions affligées face à un repas bruyant et conclu par une baise toute aussi sauvage nous font marrer. Il réussit en un regard à nous faire comprendre le cheminement d'une idée ou l'arrivée d'une émotion. Camille Constantin incarne pour sa part Gawaa, une jeune femme qui ne s'en laisse pas compter : la comédienne lui insuffle de la force de caractère, en même temps qu'une belle fragilité. Evoquons encore Bruno Sanches (Liliane dans Catherine et Liliane) et Florent Guyot dans les rôles respectifs de "Hoquet" et de "Tueur" : ils jouent avec conviction des caractères plus "marqués", dont ils parviennent à faire ressortir toutes les nuances. Et le reste du casting est tout aussi bon.
Il fallait d'excellents comédiens pour rendre crédible et surtout captivante cette saga préhistorique. La photo est magnifique et met en valeur les sublimes décors naturels de Dordogne. Lesquels nous aident à nous immerger pleinement dans l'histoire. Quant à la musique, il n'y en a pas. Enfin, ce n'est pas tout à fait vrai : les sons (le cuicui d'un oiseau, le bruit de pierres qui s'entrechoquent...) sont utilisés pour créer de petites mélodies qui accompagnent certaines scènes. Benjamin Rocher signe une réalisation inspirée : jamais tape à l'oeil, elle utilise au mieux les décors tout en mettant l'humain au premier plan. Certaines séquences en plans fixes sont autant d'hommages au slapstick tandis que la poésie s'invite dans certains moments chargés en émotions. Il y a aussi des tas de belles trouvailles, sonores et visuelles, pour parler d'amour, de la faim, de la peur ou de la joie.
Car, enfin, une des grandes réussites de Moah, c'est son ton original. La violence de ces temps difficiles est omniprésente mais en même temps, la série est portée par l'humour et l'émotion. J'ai dévoré les dix épisodes plus vite qu'une cuisse d'auroch cuite sur la braise. Bref, Moah est drôle, captivant, audacieux, étonnant et émouvant. Encore une belle production d'Empreinte digitale (Missions, Trauma). J'exige une saison 2 !
crédits photo : Empreinte digitale
Anderton
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