Artistes : Mettant à l'honneur Jean-Marie Poiré, le troisième épisode de Juste une mise au point, la série documentaire consacrée aux maîtres de la comédie à la française, est disponible sur OCS Géants. L'occasion pour le réalisateur des Visiteurs de revenir sur un parcours commencé dans le rock avec la volonté de s'affranchir de la tutelle paternelle.
Devant les caméras de Sébastien Labadie, Jean-Marie Poiré visionne des extraits de certains de ses films ainsi que des images d'archives retrouvées auprès de chaînes de télévision francophones. Autant d'occasions pour lui d'évoquer dans un grand sourire une carrière de cinéaste qui n'avait rien d'écrite à l'avance.
Papa, le rock et les jolies filles
Jean-Marie est le fils d'Alain Poiré, l'un des plus grands producteurs de cinéma selon le fiston. Et en effet, Poiré Senior apparaît aux génériques des Tontons flingueurs, de Fantômas, du Cerveau, du Grand Blond, de Flic ou Voyou, d'un Eléphant ça trompe énormément et de beaucoup, beaucoup d'autres. Forcément, avoir un papa si influent, on se dit que ça aide pour se lancer dans le cinéma. Or, pas du tout. Employé de la Gaumont, Alain a toujours été très réservé pour faire travailler son fils, ne voulant absolument pas tomber sous l'accusation de népotisme. Jean-Marie révèle d'ailleurs en se marrant que son paternel ne lui a jamais fait de cadeau, que ce soit en lui faisant signer des contrats peu avantageux ou en lui piquant des acteurs ! "C'est la règle du jeu", justifiait en substance le producteur.
"J’aurais adoré être gigolo", avoue Jean-Marie, hilare. D'où un début de carrière passé à photographier des jolies filles et à chanter du "hard rock" au sein d'un groupe (devenu culte), les Frenchies. Il parvient d'ailleurs à convaincre le patron de Gaumont Actualités de réaliser un reportage sur sa bande chevelue et échevelée. Ce dernier accepte mais ne veut pas dépenser d'argent pour le montage. C'est donc Jean-Marie qui s'y colle. Son premier film sera donc un reportage... sur lui et ses potes musiciens.
Ecriture et râteaux
La première passion du petit Poiré, c'est l'écriture. Encore gamin, il rédige deux ou trois bouquins (qui ne seront pas publiés). Lors d'un cocktail, il discute littérature avec Michel Audiard, qui lui proposera alors de lui filer un coup de main sur ses scénarios. "Pourquoi m'avoir embauché ?", demande Jean-Marie. "Pour emmerder ton père", répond le dialoguiste. C'est donc par le scénario que le jeune Poiré aborde vraiment le cinéma. Auprès du "petit cycliste", il va évidemment apprendre beaucoup. "Audiard était un génie et un demi-escroc", capable de bâcler le boulot pour se faire de l'argent, précise tout de même JMP. Plus tard, il continuera d'écrire à quatre mains d'abord avec Josiane Balasko, pendant le tournage des Bronzés font du ski, où le courant passe bien avec Christian Clavier, qui deviendra son partenaire de scripts sur plusieurs films. Et pourtant, sur le tournage du Père Noël est une ordure, Poiré a bien énervé la troupe du Splendid, à vouloir mettre son nez dans un scénar calqué sur une pièce à succès. "J'ai failli gicler", reconnaît-il.
D'ailleurs, Poiré sait mettre de l'eau dans son vin. Et expliquer avec diplomatie à la grande Jacqueline Maillan qu'elle en fait trop dans Papy fait de la résistance. Elle le reconnaîtra d'ailleurs et le remerciera après la sortie du film. Bon, Poiré s'emballe peut-être un peu lorsqu'il dit que le personnage de la Bourdelle est "un des plus grands rôles pour une femme au cinéma"... Au passage, on apprend que Jerry Lewis avait un temps été envisagé pour jouer dans le film. "Je me suis pris des râteaux par des acteurs", confesse le cinéaste, avant d'enchaîner : "Heureusement ma vie privée est plus agréable". Reste que certains comédiens ont été moins difficiles. Philippe Noiret donnera son accord pour jouer dans Twist again à Moscou sans lire le scénario, mais parce que le déjeuner avec Poiré s'est bien passé.
Succès, bides et posture
De Poiré, on se souvient des grands succès, dont celui des Visiteurs. Et pourtant, rien n'était gagné : une comédie avec des dialogues en vieux français... les producteurs n'ont pas été convaincus d'emblée ! Quant à son film culte, Mes Meilleurs copains, le premier qu'il a produit avec Christian Fechner et Christian Clavier, ce fut un "franc échec". Poiré évoque les lendemains de bides, quand il devenait tricard au sein de la profession. Au début du XXIe siècle, il reste même douze ans sans tourner...
Au cours de cette conversation enjouée, Jean-Marie se donnerait presque l'image d'un "fumiste". "Entre les bonnes critiques et les sous, j’ai choisi les sous", lâche-t-il, goguenard. Or, on comprend que Poiré est cultivé, intelligent, féministe même (les trois rôles principaux de son premier film, Les Petits câlins, sont tenus par des femmes). On n'est pas dupes, Jean-Marie !
Une fois de plus, cette heure passe trop vite et on aurait bien aimé l'entendre parler réalisation et surtout montage (car il y a de quoi dire sur ses découpages survoltés, notamment sur Les Anges gardiens). Mais bon, c'était juste une mise au point. Laissons quand même le mot de la fin à cet attachant cinéaste : "C'est un privilège de pouvoir vivre du métier d’artiste".
Anderton
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