En DVD : A Cineblogywood, année après année, on évoque de plus en plus le cinéma allemand – et notamment Rainer Werner Fassbinder. Pourquoi ? Double raison : d’abord, grâce à Carlotta, qui réédite patiemment toute son œuvre, tout support confondu (on peut actuellement revoir Despair en salles, par exemple). Et surtout, parce qu’à la redécouverte de ses films, on mesure à quel point le cinéma hollywoodien constitue une matrice essentielle pour comprendre son œuvre. Nouvelle preuve avec Lili Marleen qui sort en DVD, chez Carlotta donc. Trois bonnes raisons d’entonner l’air de Lili Marleen :
Le film le plus célèbre de Fassbinder
1 – parce qu’il s’agit du film le plus célèbre de son auteur. Superproduction dotée de grands moyens, reconstitution épique de l’Allemagne nazie, décors rutilants, casting international – outre sa fétiche Hanna Schygulla, star allemande des années 80, on y trouve l’Italien Giancarlo Gianini (L’Innocent) et l’Américain Mel Ferrer (Guerre et paix, Scaramouche) – Lili Marleen est le prototype d’un type de cinéma désormais disparu : la super-production à prestige, réalisée par un réalisateur de renom – type productions Toscan du Plantier (Carmen de Francesco Rosi ou bien La Cité des femmes de Federico Fellini) alors très en vogue.
Une pierre angulaire
2 – parce qu’il marque une étape dans le « grand œuvre » du réalisateur. Soucieux de scruter les origines de l’Allemagne – alors RFA, en proie au terrorisme d’extrême gauche et à la relecture de son passé nazi – Fassbinder pose avec ce biopic romancé consacré à Lale Andersen, l’interprète de la fameuse chanson idôlatrée aussi bien par les nazis que par les alliés la pierre angulaire de son projet – dont Le Mariage de Maria Braun, Lola une femme allemande, Le Secret de Veronika Voss l’admirable feuilleton TV Berlin AlexanderPlatz, d’après Döblin - constituent les autres briques. Et rétrospectivement, parce qu’il clôt la vague rétro-nazie alors à l’œuvre et entamée 10 ans plus tôt – Les Damnés, Portier de Nuit, Cabaret.
Emblématique
3 – parce qu’au-delà de quelques concessions formelles, il demeure emblématique de la Fassbinder’s touch : goût du mélo, héroïne à la Dietrich bigger than men éperdue d’amour, décors rutilants, débauche d’effets de lumière – dus à son fidèle chefop Xaver Schwarzenberger. Mais attention : pas de premier degré, juste cette distanciation si typique de son art, qui justifie à la fois tous les excès formels, évite tout jugement moral et écarte toute interprétation relative à une supposée fascination du cinéaste à l’égard du nazisme.
A signaler également la sortie par Carlotta de Whitty, un « western social » ( !!) inédit de Fassbinder, autre témoignage de sa fascination pour Hollywood et de ses obsessions – le racisme, homosexualité, rapport de classes. Une curiosité qui rappelle étrangement Dogville et Manderlay de Lars von Trier.
Travis Bickle
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