jeudi 19 décembre 2019

Star Wars L’Ascension de Skywalker : la chute de Kennedy

En salle : Un naufrage galactique. Une catastrophe industrielle. Un gâchis inouï. Je ne suis pas certain de trouver les mots assez forts pour exprimer la colère que j’ai ressenti en visionnant Star Wars L’Ascension de Skywalker. Mais en prenant un peu de recul et sans faire de spoiler, on peut au moins commencer à attribuer les blâmes. 



D’abord à une femme, Kathleen Kennedy, qui a été incapable de livrer une vision cohérente de cet univers qu’elle laisse à l’agonie. Les Star Wars, à l’instar des films Marvel, sont des films de producteurs. Ce n’est pas un gros mot, cela signifie simplement que la vision globale, celle d’en haut, celle qui est sensée relier chaque œuvre individuelle pour en faire un tout cohérent, est sous le contrôle d’un homme ou d’une femme fort.e. C’est certainement frustrant pour les scénaristes et les réalisateurs, mais ça permet une cohérence quand une œuvre doit se décliner sur plusieurs films. 

Kevin Feige, le grand manitou de Marvel Studios, y est parvenu avec un brio incontestable. Si individuellement tous les films ne sont pas géniaux, il est indiscutable que lorsque Infinity War arrive sur les écrans, tout tient parfaitement la route. Le final en est sublimé et incroyablement gratifiant pour les fans de la première heure.

Kathleen Kennedy, elle, en seulement 3 (+2) films, s’est cassée les dents. Pire, il s’agit probablement de l’un des plus grands déballonnages de l’histoire cinématographique. Incapable d’imposer une vision, une ligne directrice, un semblant de propos, sa trilogie s’est transformée en une bataille d’ego entre deux hommes, J.J. Abrams et Rian Johnson. Abrams a ouvert des portes dans Le Réveil de la Force, Johnson les a fermés une par une dans Les Derniers Jedi, mais avec une forme de bravoure qui rendait le film digeste et presque agréable. Mais J.J., vexé, a consacré toute son énergie à effacer méthodiquement tous les éléments laissés par Johnson. Dans la culture geek, le mot "retcon" signifie la réécriture d’un passé fictionnel, pour se donner de nouvelles possibilités narratives. L’Ascension de Skywalker est un retcon assumé des Derniers Jedi. Des éléments centraux et des personnages sont réécrits, quitte à créer des incohérences irrémédiables. 

La réaction du public envers les choix radicaux des Derniers Jedi avait été, certes, contrastée, mais comment peut on accepter de se trahir autant d’un film à l’autre ? C’est probablement aussi cette peur du Fan, ou cette volonté de leur plaire, qui justifie des choix scénaristiques, du fan service, et des rebondissements grand-guignolesques qui non seulement se révèlent décevants, mais qui en plus piétinent allègrement la quasi-totalité des deux trilogies de George Lucas (dont l’absence à l’avant-première mondiale du film a été très remarquée).


La prélogie de Star Wars continue de susciter le débat presque 20 ans après sa sortie. Ses dialogues ratés, ses acteurs perdus, son rythme décousu... Mais au moins Lucas savait ce qu’il voulait raconter, et comment il voulait le raconter. C’est probablement pour ça que si les films continuent de diviser, le lore de la prélogie fait aujourd’hui partie intégrante de la mythologie Star Wars. Une sorte d’arbre décrépit qui cachait une forêt luxuriante.

L’Ascension de Skywalker est le dernier chapitre d’une trilogie ratée qui n’avait rien à raconter. Une hydre dont chacune des têtes dévorerait la précédente. Un ratage complet qui ne pourra s’apaiser que par le départ sans honneur de la présidente de Lucasfilm. Un gâchis irrattrapable qui nous privera de la dernière chance que nous avions de revoir Luke, Han, Leia et Chewie une dernière fois ensemble. 

Désolé les copains, vous méritiez tellement mieux !


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