Buzz : A Cineblogywood, The Irishman divise. Quand Marcel Martial atomise le film, L'Oncle Owen est plus nuancé et pour ma part, j’y vois un message fort du maître Scorsese à l’aube de ses 80 ans. Vouloir lire entre les lignes ou pas, that is the question. Grand débat à la rédac !
Marcel Martial : The Irishman, c’est un peu le vieux (mais alors vieux, vieux) copain que l’on n’a pas vu depuis des années. Le gars était sympa et son souvenir plaisant. Les retrouvailles rappellent que les souvenirs sont parfois trompeurs... Souvent ? Marty a été plus pertinent avec sa sortie sur les films Marvel que lorsqu'il essaie de nous sortir son énième variation du film de gangster/ mafia/ pègre... On n’oubliera jamais Les Affranchis, ni Casino.
Joanna Wallace : Je ne te rejoins pas sur ces points. On n’est pas dans une logique de "On prend les mêmes et on recommence" : Martin Scorsese l’a dit, il ne voulait pas se répéter. Alors oui, le cast a vieilli. Mais réveillez-vous, le "Rat Pack" du cinéma a presque 80 ans ! De Niro, Pacino, Pesci, Keitel and co ne sont pas là pour faire des cascades et risquer de se casser la hanche. The Irishman, c’est une métaphore sur la fin d’une très grande époque, celle des films de gangsters de Scorsese, le tout sur fond d’amitié.
L'Oncle Owen : C’est juste, The Irishman est un bon film et indéniablement un film comme on en fait de moins en moins, ou plus du tout. Du moins en dehors des cinémas indépendants et des plateformes de streaming. Avant même de porter une critique sur le film, il faut se réjouir qu’un Scorsese puisse obtenir 160 millions de dollars pour un film de plus de trois heures avec des acteurs d’une moyenne d’âge de 77 ans et une liberté de ton et de forme clairement totale.
Marcel Martial : Mais vous êtes sérieux ? C’est un téléfilm à 160 millions de dollars pour 3h30... et aussi le somnifère le plus cher de l’histoire. On comprend pourquoi 18% seulement des Américains ayant vu le film sur Netflix l'ont regardé jusqu'à la fin. Et encore, on ne sait pas en combien de fois. Pas de chiffres en France ? En laissant le "total control" à Scorsese, Netflix s’est tiré une balle dans le pied. Il aime les films longs - cf l’interminable Silence.
L'Oncle Owen : Je suis d’accord sur le fait que c’est bien trop long. Le grand Steven Spielberg nous a souvent dit qu’il devait les meilleures scènes de sa carrière à des compromis. Par manque d’argent, par manque de possibilités techniques, on improvise et on délivre une œuvre beaucoup plus créative.
Sans aucun compromis Scorsese livre une œuvre looooongue, et même le plus grand fan devra admettre qu’il y a bien 45 minutes de trop. Avec la pression commerciale d’une sortie en salle et des producteurs plus exigeants, il ne fait presque aucun doute que Scorsese aurait dû s’imposer une rigueur qui, peut-être, aurait fait du bien au film. Je ne peux m’empêcher de penser que la version cinéma de The Irishman - qui n‘existera jamais - aurait été une œuvre complètement différente.
Joanna Wallace : Certes, c’est un peu long. Mais c’est aussi et surtout un film sur le temps qui passe, cette inexorable fatalité pour tout un chacun, mafieux ou non. Pour ma part, je l’ai visionné en deux fois mais cela n’enlève rien à la qualité du film. Vous n’auriez peut-être pas le même point de vue si Scorsese en avait fait une série de 5 ou 6 épisodes. Soyons sérieux, la cinématographie est superbe avec certains plans incroyables, c’est extrêmement bien filmé et le film adresse quand-même de sacrés morceaux de l’Histoire américaine ! Que dit Scorsese de l’Amérique et globalement de ces moments de son Histoire ? Que pour la jeune génération, ils sont déjà presque oubliés. Le récit s’étale sur environ quarante ans, entre les années 1960 et le tout début des années 2000. D'où le recours au de-aging pour rajeunir les acteurs, et c’est là que le bât blesse.
A la décharge de Scorsese, cela fait plus de 10 ans qu’il essayait de faire ce film - dont aucun studio ne voulait selon lui. Entre temps ses acteurs ont vieilli et du coup, impossible de se contenter du maquillage. Malheureusement, le de-aging ne fonctionne globalement pas, en particulier pour De Niro au début du film : expressions figées, décalage dans les postures corporelles entre son âge réel et l’âge de son personnage.
Marcel Martial : Effectivement, il faut dire qu’il s’est pris d’affection pour les effets numériques depuis déjà longtemps - Les nerfs à vif. Du coup, sa "face app" pour faire rajeunir ses acteurs l’emporte jusqu'au ridicule lors d’une scène de dialogue entre Robert De Niro et Joe Pesci, 76 ans chacun, où les effets de lifting leur confèrent les mêmes têtes que les orcs de World of Warcraft - le film, pas le jeu !. Du coup, impossible de suivre l’histoire déjà pesante car déjà vue, revue et re-re-vue, avec ses faux airs de cinématique de jeu vidéo.
L'Oncle Owen : Je reste moi aussi assez perplexe sur cette technologie de lifting digital. Parfois ça fonctionne vraiment bien. J’avais été bluffé par les courtes scènes d’un Robert Downey Jr jeune dans les films Marvel ou même celui de Samuel Jackson tout au long de Miss Marvel. Mais dans The Irishman, c’est presque l’intégralité du film qui doit subir ce lifting et pour un écart d’âge infiniment plus important que ceux de Downey et de Jackson.
Parfois ça passe parfaitement. Pesci et Pacino s’en sortent parfaitement bien. Mais pour De Niro il y a effectivement une sensation étrange et particulièrement prononcée à certains moments qui m’ont littéralement sorti du film. Un bon effet est un effet qui ne se voit pas. Celui-ci se voit.
Marcel Martial : Et le jeu d’acteurs, parlons-en ! Al Pacino est encore dans sa carrière au théâtre et fait de son Hoffa une parodie en roue libre. Il ne manque que les rires des émissions en live. Enfin, les seconds rôles sont laissés à vau-l'eau, Paquin et Keitel sont venus voir les copains mais ne servent à rien.
Joanna Wallace : Pas d’accord pour Pacino qui, selon moi, dégage une énergie impressionnante dans l’interprétation de Jimmy Hoffa. Elle contraste avec celle de De Niro pour le personnage de Sheeran, relativement impassible. On peut aussi saluer les seconds rôles de Stephen Graham ou Bobby Cannavale.
Marcel Martial : En conclusion, on ne peut pas en même temps surveiller sa prostate et ses acteurs.
Joanna Wallace : Sacré Marcel ! En conclusion, Scorsese nous délivre un message, et fort heureusement, chaque spectateur pourra se faire son propre avis.
Joanna Wallace
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire