jeudi 27 janvier 2022

L’Ennemi : Jérémie Renier, atout-maître

L'Ennemi Jérémie Rénier CINEBLOGYWOOD


En salles : Face caméra. Le visage d’Alma Jodorowsky, radieux. En arrière-plan, une plage, gorgée de soleil. Elle entonne la superbe chanson de Mouloudji, Un beau jour, tu verras... Cut. Nous voici dans une voiture qui roule à toute vitesse. Caméra en contre-plongée sur Jérémie Renier, costume débraillé, qui s’énerve au téléphone. "J’arrive, reste !"». Introduction ô combien énigmatique pour L'Ennemi, un film qui l’est tout autant, signé par le réalisateur belge Stephan Streker, qui avait déboulé au cinéma avec force en 2017 avec son film Noces, nommé aux Césars du meilleur film étranger.

Commence alors une intrigue... intrigante qui repose sur un fait divers qui avait défrayé la chronique belge en 2013, l’affaire Bernard Wesphael. Louis Durieux, jeune quadra politique wallon en pleine ascension, se retrouve un soir aux côtés du cadavre de son épouse, Maeva, journaliste politique, dans une chambre d’hôtel à Ostende. Il ne se souvient de rien. Que s’est-il passé dans la chambre 108 ? Meurtre ? Suicide ? Commence alors une longue descente aux enfers pour le quadra surmené, en plein breakdown, qui passe par la case prison et procès. Jusqu’au bout ? Le mystère demeure...

Certes, le parti pris narratif captive l’attention. Il s’agit moins ici de révéler l’issue de l’intrigue que de soulever des questions morales : le poids de la culpabilité, le mensonge en amour, la fragilité de la vérité. Et le cinéaste de multiplier les pistes – une même scène vue de différents points de vue – sans jamais juger ses personnages. D’où parfois une certaine confusion dans l’esprit du spectateur.

Jérémie Renier, atout-maître

L’atout-maître du film, c’est son acteur principal, Jérémie Renier. De tous les plans, il crève l’écran. Au moment où le décès brutal et accidentel de l’acteur français Gaspard Ulliel endeuille la planète cinéma et suscite une vague d’émotion justifiée, il serait bon de célébrer les acteurs et actrices de leur vivant, et non d’attendre leur décès pour mieux les regretter. Et Jérémie Renier entre dans cette catégorie. Rien que cette année, l’acteur belge révélé il y a près de 30 ans par les frères Dardenne dans La Promesse aura livré quatre prestations exemplaires, investies et marquantes : Slalom, L’Homme de la cave, et L’Ennemi. Sans oublier celle d'Albatros, pour laquelle il mériterait un César, sans discussion aucune. Et qu’il n’aura pas. Faute incompréhensible de nomination. 

Porté par la puissance de l’interprétation de Jérémie Renier, L’Ennemi émeut, captive, bouleverse. De par la rage, l’ambiguiïé et l’humanité qui émane de son jeu, il parvient à se hisser au niveau d’un Kirk Douglas. Pas moins. Rien que pour cela, courez voir L’Ennemi.

Travis Bickle

 

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