Artistes : Il y a tout juste 30 ans, le 15 mars 1983, disparaissait, emporté par un cancer, un des acteurs les plus emblématiques de sa génération – celle des Delon, Belmondo, Rich, Terzieff - Maurice Ronet, né Robinet. Carrière protéiforme – plus de 100 films en moins de 40 ans ! Beaucoup de nanars, quelques trop rares chefs-d'oeuvre, de très nombreuses fidélités – Louis Malle, Claude Chabrol, René Clément, Roger Vadim, c'est l'acteur français qui aura le plus souvent décédé à l'écran, dixit Ronet lui-même (environ 17 fois). Mais quand on évoque son nom, c'est d'abord une présence, un charisme, un regard, qui viennent à l'esprit. Rares dans le cinéma français. Et qui le rapprochent de ces comédiens anglo-saxons, irradiants, qu'un seul geste installent dans le plan, John Garfield, Marlon Brando, John Cassavetes ou Robert Shaw.
Artiste à la destinée romanesque, brûlant la vie par les deux bouts, artiste touche à tout (poésie, peinture, sculpture), séducteur invétéré (Anouk Aimée, Anna Karina...), marié 2 fois (Maria Pacôme, puis Joséphine Chaplin), fasciné par Céline, Melville et Allan Poe, sa carrière d'acteur se double d'une carrière de cinéaste, beaucoup plus discrète, mais tout autant, sinon plus, révélatrice de l'homme Ronet.
Retour sur la trajectoire d'un homme à l'indépendance et l'ouverture d'esprit peu communes dans le cinéma français, traversée par une lancinante mélancolie, un désir effréné de séduire, et un mal-être existentiel tempéré par un rire ravageur.
Retour sur la trajectoire d'un homme à l'indépendance et l'ouverture d'esprit peu communes dans le cinéma français, traversée par une lancinante mélancolie, un désir effréné de séduire, et un mal-être existentiel tempéré par un rire ravageur.
Ascenseur pour l'échafaud (1957) : Le film le plus mythique et le plus cité de Louis Malle. Jeanne Moreau errant dans un Paris froid et métallique, Maurice Ronet terré dans son ascenseur, la musique de Miles Davis... ce film possède un avant-goût de Nouvelle vague avant l'heure. Qui marquera à jamais la l'image de Maurice Ronet comme acteur existentiel, comportementaliste, mélancolique, prêt à se jeter dans les gouffres des matins blêmes.
Plein Soleil (1960) : d'après Patricia Highsmith, ce polar psychologique situé dans l'Italie de la dolce vita a pour héros deux hommes - « en gros, l'histoire de deux pédés ! » dira son scénariste Paul Gégauff – qui se battent pour les beaux yeux de Marge, la mystérieuse marie Laforêt. Première rencontre avec son double solaire, Alain Delon. Inoubliable scène de voile, inoubliable duel au soleil pervers et machiavélique, magnifié par la lumière d'Henri Decae.
Le Feu follet (1963) : ultime errance parisienne d'Alain Leroy, incarné par un exceptionnel Maurice Ronet, avant un fatidique 23 juillet, sur des notes de Satie. « Demain, je me suicide ! ». En adaptant Drieu la Rochelle, Louis Malle rend compte du mal de vivre d'une génération – celle de l'Algérie, l'action ayant été transposée des années 20 aux années 60 – mais aussi d'un existentialisme mis à mal par les conventions sociales, mondaines, bourgeoises. Un manifeste pro-liberté. Un cri de révolte existentielle. Qui a su trouver en Maurice Ronet l'incarnation la plus incandescente.
La Femme infidèle (1969) : le film le plus célèbre de son association avec un autre grand cinéaste, Claude Chabrol. 5 films en ensemble – pas les plus mémorables de leur réalisateur, malheureusement. Dans celui-ci, dans le rôle de l'amant, il affronte le couple Bouquet-Audran, aux motivations pour le moins ambiguës.
La Piscine (1969) : 2ème fois où face à son « jumeau » maléfique, Alain Delon, Maurice Ronet meurt en play-boy vieillissant, passablement éméché, dans le huis clos d'une piscine tropézienne. Pour les beaux yeux incandescents de Romy Schneider, au sommet de sa beauté. Triomphe public et critique, dans lequel il excelle à jouer le double torturé et vieillissant d'Alain Delon, à la beauté renversante.
Raphaël ou le débauché (1971) : adaptation fortement inspirée de la liaison Musset-Sand, le film de Michel Deville dresse le portrait d'un séducteur cynique et misanthrope, qui rencontre subitement l'amour sous les taits de Françoise Fabian. Une sorte d'auto-portrait romantique de l'acteur, qui se livre comme jamais. Son plus beau rôle ?
Mort d'un pourri (1977) : dans ce polar de Georges Lautner sur l'affairisme des années Giscard – on se pince à l'idée qu'à l'époque, le cinéma de genre français était capable d'être aussi audacieux, en tout cas dans le choix de ses sujets ! - Ronet fait une apparition éclair dans le rôle d'un député compromis dans un scandale financier, qui s'achève une fois de plus dans le sang. Dernière confrontation avec son jumeau solaire Delon.
Beau-père (1981) : dans ce très délicat pseudo-remake de Lolita signé Bertrand Blier, Maurice Ronet joue le père, un peu dépassé par les événements et la liaison amoureuse qui lie sa fille avec le pianiste incarné avec beaucoup de pudeur par Patrick Dewaere. L'une de ses dernières apparitions à l'écran, au moment même où il devint père – un rôle aux résonances auto-biographiques ?
Et côté réalisations, trois films à relever, à revoir :
Le Voleur de Tibidabo (1964) : gros échec commercial à sa sortie, inconnu à mon bataillon, que la revue Schnock a récemment sortie des limbes dans son dernier numéro. Qualifié d'objet cinématographique non-identifié, intégralement tourné à Barcelone, il dresse le portrait d'un homme proche d'Alain Leroy, héros du Feu follet. Sauf qu'au désespoir lui succède non le suicide, mais la fuite dans le rire et la fantasia. A revoir ?
L'Ile des dragons (1973) : documentaire mythique de l'acteur, consacré aux fameux lézards géants indonésiens, les komodos. Pas de commentaires, juste La création du monde de Haydn pour bande-son. Une sorte de suicide commercial. Le geste d'un homme libre et audacieux, en quête de quiétude après une série de deuils intimes, à rapprocher de celui d'un Brel réfugié aux Marquises ?
Bartleby (1976) : adaptation TV du célèbre et mystérieux novell d'Herman Melville, que l'acteur portait en projet depuis ses débuts. Eloge du renoncement et de l'indifférence, résumé par la formule lancinante de son faux héros, I would prefer not to. Un projet détonnant dans la carrière de l'acteur, qui aurait souhaité interpréter le rôle-titre, finalement tenu par Maxence Mailfort. Très gros succès critique pour cette oeuvre aux résonances kafkaïennes, que certains n'hésitent pas à comparer aux meilleurs Losey, The Servant ou M. Klein.
Plein Soleil (1960) : d'après Patricia Highsmith, ce polar psychologique situé dans l'Italie de la dolce vita a pour héros deux hommes - « en gros, l'histoire de deux pédés ! » dira son scénariste Paul Gégauff – qui se battent pour les beaux yeux de Marge, la mystérieuse marie Laforêt. Première rencontre avec son double solaire, Alain Delon. Inoubliable scène de voile, inoubliable duel au soleil pervers et machiavélique, magnifié par la lumière d'Henri Decae.
Le Feu follet (1963) : ultime errance parisienne d'Alain Leroy, incarné par un exceptionnel Maurice Ronet, avant un fatidique 23 juillet, sur des notes de Satie. « Demain, je me suicide ! ». En adaptant Drieu la Rochelle, Louis Malle rend compte du mal de vivre d'une génération – celle de l'Algérie, l'action ayant été transposée des années 20 aux années 60 – mais aussi d'un existentialisme mis à mal par les conventions sociales, mondaines, bourgeoises. Un manifeste pro-liberté. Un cri de révolte existentielle. Qui a su trouver en Maurice Ronet l'incarnation la plus incandescente.
La Femme infidèle (1969) : le film le plus célèbre de son association avec un autre grand cinéaste, Claude Chabrol. 5 films en ensemble – pas les plus mémorables de leur réalisateur, malheureusement. Dans celui-ci, dans le rôle de l'amant, il affronte le couple Bouquet-Audran, aux motivations pour le moins ambiguës.
La Piscine (1969) : 2ème fois où face à son « jumeau » maléfique, Alain Delon, Maurice Ronet meurt en play-boy vieillissant, passablement éméché, dans le huis clos d'une piscine tropézienne. Pour les beaux yeux incandescents de Romy Schneider, au sommet de sa beauté. Triomphe public et critique, dans lequel il excelle à jouer le double torturé et vieillissant d'Alain Delon, à la beauté renversante.
Raphaël ou le débauché (1971) : adaptation fortement inspirée de la liaison Musset-Sand, le film de Michel Deville dresse le portrait d'un séducteur cynique et misanthrope, qui rencontre subitement l'amour sous les taits de Françoise Fabian. Une sorte d'auto-portrait romantique de l'acteur, qui se livre comme jamais. Son plus beau rôle ?
Mort d'un pourri (1977) : dans ce polar de Georges Lautner sur l'affairisme des années Giscard – on se pince à l'idée qu'à l'époque, le cinéma de genre français était capable d'être aussi audacieux, en tout cas dans le choix de ses sujets ! - Ronet fait une apparition éclair dans le rôle d'un député compromis dans un scandale financier, qui s'achève une fois de plus dans le sang. Dernière confrontation avec son jumeau solaire Delon.
Beau-père (1981) : dans ce très délicat pseudo-remake de Lolita signé Bertrand Blier, Maurice Ronet joue le père, un peu dépassé par les événements et la liaison amoureuse qui lie sa fille avec le pianiste incarné avec beaucoup de pudeur par Patrick Dewaere. L'une de ses dernières apparitions à l'écran, au moment même où il devint père – un rôle aux résonances auto-biographiques ?
Et côté réalisations, trois films à relever, à revoir :
Le Voleur de Tibidabo (1964) : gros échec commercial à sa sortie, inconnu à mon bataillon, que la revue Schnock a récemment sortie des limbes dans son dernier numéro. Qualifié d'objet cinématographique non-identifié, intégralement tourné à Barcelone, il dresse le portrait d'un homme proche d'Alain Leroy, héros du Feu follet. Sauf qu'au désespoir lui succède non le suicide, mais la fuite dans le rire et la fantasia. A revoir ?
L'Ile des dragons (1973) : documentaire mythique de l'acteur, consacré aux fameux lézards géants indonésiens, les komodos. Pas de commentaires, juste La création du monde de Haydn pour bande-son. Une sorte de suicide commercial. Le geste d'un homme libre et audacieux, en quête de quiétude après une série de deuils intimes, à rapprocher de celui d'un Brel réfugié aux Marquises ?
Bartleby (1976) : adaptation TV du célèbre et mystérieux novell d'Herman Melville, que l'acteur portait en projet depuis ses débuts. Eloge du renoncement et de l'indifférence, résumé par la formule lancinante de son faux héros, I would prefer not to. Un projet détonnant dans la carrière de l'acteur, qui aurait souhaité interpréter le rôle-titre, finalement tenu par Maxence Mailfort. Très gros succès critique pour cette oeuvre aux résonances kafkaïennes, que certains n'hésitent pas à comparer aux meilleurs Losey, The Servant ou M. Klein.
Travis Bickle
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