En DVD : Coupe du monde de foot, grand soleil et polémique entre Monsieur Poulpe et les internautes... trois raisons qui n'ont pas aidé Budapest à faire carrière en salle, en juin dernier. Certains d'entre vous ajouteront sûrement que le problème tient avant tout à l'histoire, voire à l'affiche. C'est votre droit et je le respecte. Quant à moi, j'ai découvert le film de Xavier Gens à l'occasion de sa sortie en vidéo et je trouve qu'il y a au moins trois raisons de lui redonner sa chance.
1) Une "crazy story"
Vincent et Arnaud, deux quadra diplômés d'HEC qui se font chier au boulot et un peu dans leur vie, décident de monter une boîte événementielle, comme on dit. Avec une spécialisation : les enterrements de vie de garçon (aka EVG) à Budapest. Pourquoi la capitale hongroise ? Beaucoup de filles et d'endroits pour faire la fête pas cher. Le scénario improbable, signé Simon Moutaïrou et Manu Payet, est pourtant inspiré d'une histoire vraie. En allant sur le site de la boîte à l'origine de ce concept déglingo, on ne peut qu'être effaré par les "activités" proposées aux fêtards : wild party et club de striptease (ça, c'est le plus classique) mais aussi tir à l'AK47, "combat" contre des chiens, réveil pizza... A l'instar des épouses des cofondateurs dans le film, il y a de quoi trouver ça vulgaire et déplacé. Autant tu ne me feras jamais participer à un séjour comme ça IRL, autant au cinéma je suis prêt à me laisser emporter dans des situations hénaurmes, certes pas toujours fines mais souvent délirantes et très drôles.
Et je n'ai pas été déçu. Le film nous fait découvrir un Budapest bourré de clichés, de drogues et d'alcools, où les femmes semblent toutes sortir d'une prod Dorcel et les hommes de Délivrance - le banjo en moins. Caricatural ? Bien sûr que oui, même si un passage sur le fameux site d'EVG rappelle que la réalité dépasse souvent la fiction. A travers les yeux parfois ébahis, parfois effarés de Vincent et Arnaud, on prend part à des activités déjantées. A l'énormité des situations répondent des dialogues très drôles, avec des répliques qui claquent.
2) Un quintet au top
Manu Payet (Vincent) et Jonathan Cohen (Arnaud) forment une sacrée belle paire. Le premier dans le rôle du cadre sérieux qui se laisse convaincre par un projet fou mais a priori très rentable et le second dans celui du pote bien décidé à changer de vie. Deux types normaux qui basculent : comment voulez-vous qu'ils reculent ? La complicité des acteurs imprègne la relation des personnages. Quel plaisir de les voir s'envoyer des vannes ou délirer ensemble. Bien sûr, il faut être fan de Payet et Cohen, qui avaient déjà partagé l'affiche de la très bonne comédie Ami-ami, sans avoir de scènes ensemble. Moi, je le suis. Comme de Monsieur Poulpe. Oui, son tweet a énervé fort beaucoup de twittos mais le bonhomme livre une énorme prestation dans le rôle de Georgio, le "contact" local de Vincent et Arnaud, un branleur irresponsable et gaffeur. Cheveux (dé)colorés, short en jean, chemise ouverte et tatouages affreux. Il n'y a que lui qui pouvait assumer autant de connerie et de "beauferie", tout en nous faisant autant marrer. Et puis, il y a les épouses. Alice Belaïdi interprète Cécile l'enjouée, soutien de la première heure. Elle apporte beaucoup de fraîcheur et de naturel à son personnage avant de nous scotcher lors d'une dispute avec son mari à l'écran : la voici bouleversante de justesse. Audrey, l'épouse plus stricte d'Arnaud, est jouée par Alix Poisson. Là encore, quand le couple bat de l'aile, l'actrice fend l'armure. Car la grosse comédie bien fendarde se voile ici et là de gravité, évoquant la crise de la quarantaine, questionnant la "réussite", n'occultant pas les conséquences sur le mariage des délires en terre hongroise. Sans trop en faire. Juste ce qu'il faut.
3) Une réalisation électrique
Belle idée d'avoir confié la réalisation de Budapest à un cinéaste "de genre". Xavier Gens signe une mise en scène rythmée, bourrée de trouvailles et références visuelles. Dans le making of du bonus, il évoque le Satyricon de Fellini comme inspiration pour les scènes orgiaques, j'ai aussi pensé à Eyes Wide Shut. Bien sûr, on pense forcément à Very Bad Trip ou Serial Noceurs. Il y a des plans de toute beauté, magnifiés par la photo de Gilles Porte, qui évoquent Terrence Malick ou Michael Mann. Oui, oui. Et le film finit en apothéose avec une géniale séquence filmée au ralenti. Autre cinéaste de qualité, Julien Leclercq (L'Assaut, Braqueurs) est à la prod.
Tout ça pour dire que Budapest mérite une seconde chance car c'est une comédie délirante et stylée.
Anderton
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