En Blu-ray et DVD : L'Homme tranquille (The Quiet man, 1952) est l'un des plus grands succès de John Ford. Rimini Editions nous propose de le redécouvrir pour la première fois en haute définition au sein d'un superbe écrin, un coffret collector deux Blu-rays + deux DVD, comprenant également un livre et quatre cartes postales. Autant d'atouts pour un film qui n'a pas pris une ride, juste quelques bleus.
Après avoir émigré aux Etats-Unis, où il a été champion de boxe, Sean Thornton revient définitivement dans son Irlande natale. A Inisfree, plus précisément, où il rachète le cottage qui avait appartenu à sa famille, au grand mécontentement de son voisin Will Danaher qui voulait également l'acquérir. La situation s'envenime quand Sean demande à Will la main de sa soeur, Mary Kate.
L'adaptation de la nouvelle de Maurice Walsh, John Ford l'a portée pendant seize ans, sans parvenir à convaincre les grands studios hollywoodiens. C'est finalement le petit indépendant Republic Pictures qui va permettre au cinéaste de retourner sur la terre de ses ancêtres. Une terre qu'il donne à admirer dans des plans sublimes, empreints de poésie, signés Winton C. Hoch. Vertes vallées ponctuées de majestueuses forêts et traversées par de riants cours d'eau, une nature idyllique sur laquelle le vent et la pluie peuvent s'abattre avec violence. L'onirisme laisse alors place à un romantisme quasi gothique.
Le climat local est à l'image du caractère des personnages. De sacrés numéros qui manient l'humour, l'invective et la colère avec une grande facilité, passant de l'un à l'autre avant même d'avoir terminé leur phrase. John Ford nous fait rencontrer un petit peuple truculent, des gens simples et dignes, à la fois généreux et mesquins, amicaux et de mauvaise foi. Tout sauf des saints mais des hommes et des femmes profondément attachants.
Folklore fordien
Bien sûr que Ford dépeint une Irlande de carte postale, à la limite du cliché mais la sincérité de son regard est telle qu'on accepte cette vision à la fois attendue et tellement fordienne. D'aucuns pourraient s'offusquer d'une approche masculiniste, pour ne pas dire patriarcale, où la femme serait réduite à une monnaie d'échange dans le cadre d'un affrontement entre deux virilités promptes à la violence. Ce qui serait une analyse étroite alors qu'une fois de plus, Ford a soigné tous ses personnages et conféré le beau rôle à Mary Kate. Malmenée, la soeur de Will démontre sa force de caractère et sa capacité à gagner son indépendance dans un monde dominé par les hommes. Des hommes qui tentent de cacher leur fragilité et leurs faiblesses en levant le coude ou en balançant un coup de poing.
Au casting, des habitués de l'univers fordien. John Wayne joue un homme placide, patient, un peu gentil, un poil macho, qui finira par faire parler ses phalanges face à un Victor McLaglen, fidèle à ses rôles de cabochard teigneux et sanguin. Maureen O'Hara incarne la passion indomptable, n'en déplaise à son amoureux : elle est bouleversante dans sa manière de se débattre et de faire accepter son point de vue qui, contrairement aux apparences, n'a rien de capricieux. On retrouve également Barry Fitzgerald en truculent conducteur de cariole porté sur la bouteille, Mildred Natwick en notable locale qui s'amuse de la compétition entre Sean et Will et Ward Bond en curé qui ne rechigne pas à laisser ses paroissiens régler leurs conflits en se tapant dessus. Noble art que la boxe.
L'Homme tranquille est une romance exaltante, drôle, qui réserve bien des séquences épiques, dont le fameux affrontement final et le baiser fougueux auquel Steven Spielberg a rendu hommage dans E.T. L'Extra-terrestre. En soi, le film est un bijou, restauré avec soin. Il est complété par de nombreux bonus passionnants : une conversation pointue entre le journaliste Frédéric Mercier et l'universitaire Cécile Cornet, un documentaire sur le rêve irlandais de John Ford, un autre sur la ville d'Innisfree (qui a inspiré celle du film), une analyse comparée entre le script et le film. Une édition riche et complète qui ravira tout amateur de cinéma. Noël approche, je dis ça comme ça.
Anderton
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