L'élection présidentielle américaine se déroule sous haute tension. La division du peuple américain est telle que le nouveau résident à la Maison-Blanche pourrait être confronté à un rejet profond de la part d'une partie des citoyens. Le risque d'une guerre civile est même évoqué tant les supporters de Trump sont remontés comme jamais. Ce scénario catastrophe, Alex Garland l'a imaginé et mis en scène, dans Civil War, qui sort ce mercredi au cinéma. Un film choc, brutal, tellement réaliste...
Lee Smith est une photographe de guerre réputée qui a couvert plus d'un conflit. Elle est aux premières loges aux Etats-Unis, où les rebelles du Texas et de Californie ont envoyé des troupes pour prendre d'assaut la Maison-Blanche. Avec son collègue Joel, elle est décidée à quitter New York pour aller interviewer le président de ce qui reste des Etats-Unis avant qu'il soit arrêté et probablement exécuté. Jesse, une jeune photographe, et le vétéran Sammy s'incruste dans la voiture de presse, contre l'avis de Lee. La petite troupe prend la route à travers un pays à feu et à sang.
Alex Garland (Men, Ex Machina) nous plonge immédiatement dans le chaos. Le discours du président sonne faux, la distribution d'eau est défaillante à Brooklyn, une kamikaze se fait sauter dans la rue, les explosions résonnent au loin et leurs champignons de fumée jaillissent de la skyline... Pourquoi le Texas et la Californie veulent-ils mettre à bas le régime actuel, pourquoi la Floride a-t-elle fait sécession, pourquoi l'Oregon est-il devenu une république maoïste ? Nous n'en saurons rien. Pas plus que le film désignera les "bons" et les "méchants".
Profession reporter
A travers le regard des quatre journalistes, le spectateur assiste au basculement d'une nation dans la guerre, avec son lot d'horreurs et d'absurdité. La situation est incompréhensible. Kirsten Dunst campe avec beaucoup de justesse une photographe qui a déjà vécu de tels conflits. Elle est à la fois consciente de ce qui se passe et en même temps, perdue, fatiguée de revivre les mêmes scènes de violence. Elle prend sous son aile la jeune Jesse, à laquelle Cailee Spaeny apporte une innocence vite souillée par les événements. Joel, interprété par Wagner Moura, donne le change : il semble prendre cette mission avec la légèreté de celui qui en a vu d'autres. Semble... Quant à Stephen McKinley Henderson, il joue le rôle du vieux journaliste dont on ne comprend pas pourquoi il tient à rejoindre la ligne de front. Ce bel ensemble est complété par Jesse Plemons, glaçant dans le rôle d'un redneck armé et affublé de lunettes rouges, et Nick Offerman, qui incarne un président dépassé mais qui joue encore du menton devant les caméras.
Garland n'épargne rien de la violence qui se déchaîne. Les morts sont brutales, les exactions aussi. Pour en souligner l'intensité et le caractère irrationnel, le cinéaste les filme parfois sur une bande son en total décalage (De La Soul notamment). Cette cruauté nous saute au visage et nous prend aux tripes. On s'identifie d'autant plus aux personnages, que cette guerre civile touche un pays occidental comme le nôtre. Et au milieu de cet enfer, quelques moments de grâce, de beauté absolue.
On sort de la salle de cinéma un peu sonné, la tête pleine de questions et même d'appréhension. Civil War est un très grand film.
Anderton
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