samedi 7 septembre 2019

Les Oiseaux de passage : polar colombien envoûtant

En DVD et Blu-ray : Alors que son dernier film, Waiting for the barbarians, avec Johnny Depp, sera présenté au Festival de Deauville 2019, Ciro Guerra est également en tête de gondole avec son opus précédent, Les Oiseaux de passage (Los Pajaros de verano). Coréalisé par Cristina Gallego, ce polar envoûtant revient sur un épisode méconnu du trafic de drogue en Colombie.


Dans la région pauvre de Guajira, dans le Nord-Est de la Colombie, entre mer et désert, vit le peuple Wayuu, organisé en clans très soudés. A la fin des années soixante, le jeune Rapayet tombe amoureux de la belle Zaina. Mais pour l'épouser, la dot est très élevée. Rapayet travaille dur. C'est alors que sur les conseils d'un ami, qui n'est pas Wayuu, il décide de se lancer dans le trafic de marijuana. L'argent afflue, bouleversant la vie de la communauté et suscitant des convoitises.



Le duo de réalisateurs nous transporte dans un monde qui semble hors du temps. Et leur parti pris de privilégier les plans fixes qui "durent" renforce ce sentiment d'entrer dans un autre univers, à la limite du fantastique, dans lequel les coutumes ancestrales de ce peuple amérindien déroutent autant qu'elles fascinent. D'autant plus que les personnages s'expriment principalement dans leur langue native, d'où jaillissent quelques phrases en espagnol. A l'écoute de la nature, à la fois mère nourricière et marâtre implacable, les Wayuu vivent selon des règles strictes dominées par le respect et la toute-puissance de la parole. Avec l'arrivée de l'argent, les hiérarchies volent en éclat, les valeurs sont emportées par le vent. Et la violence se répand. Brutale.

L'amour au temps du narco

Gallego et Guerra filment une tragédie digne de la Grèce antique. Il y a d'ailleurs l'équivalent d'un aède qui chante le drame de Rapayet et Zaina. Lequel est celui du peuple Wayuu tout entier. Il ne faudrait pas pour autant prendre Les Oiseaux de passage pour une oeuvre aux visées ethnographiques. Le récit avance inéluctablement vers un final qu'on imagine sanglant. Le polar reprend ses droits.




La photo, signée David Gallego, met magnifiquement en valeur le paysage aride et ocre de la Guajira, où éclatent les couleurs des habits Wayuu. La véracité du film tient beaucoup aux acteurs : Natalia Reyes (bientôt à l'affiche de Terminator Dark Fate) et José Acosta mais aussi tous les acteurs et figurants d'origine amérindienne qui ont participé à cette aventure. Car le tournage fut bel et bien une aventure, parfois épique, comme le montre un des suppléments du Blu-ray édité par Diaphana. Sélectionné à La Quinzaine des réalisateurs au Festival de Cannes 2018, Les Oiseaux de passage a notamment été récompensé aux festivals de Biarritz et de Beaune 2019. Laissez-vous envoûter.

Anderton

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