Artistes : C'est aujourd'hui que la Cinémathèque lance son hommage à Michelangelo Antonioni via une exposition (jusqu'au 19 juillet) et une rétrospective (jusqu'au 31 mai). Cineblogywood profite de ce grand événement pour évoquer la vie et l'oeuvre du cinéaste italien en six posts. Aujourd'hui, quatrième épisode : l'errance.
Blow Up (1967). Inspiré d'une nouvelle de Julio Cortazar, Les fils de la Vierge, Blow Up était initialement situé en Italie. Devenu son film le plus célèbre, il n'a pas eu non plus un tournage facile : premier tournage à l'étranger pour les cinéaste, il se retrouve privé de ses collaborateurs habituels, épuisé par les techniques et méthodes de travail complètement différentes. "Tourner à l'étranger avec une équipe étrangère est une expérience épuisante, mais très profitable", explique-t-il. Plus grand succès public du cinéaste, qui décrocha la palme d'Or en 1967, Blow Up constitue un document unique sur le swinging London des années 60 – en plus d'être une redoutable machine à suspense métaphysique. D'où son extraordinaire popularité. Et à l'instar de son héros photographe, Antonioni dit de son film qu'il est le récit d'une intrigue policière ontologique sur la réalité : "J'ignore comment est la réalité. Elle nous échappe et change sans cesse". Confère cette fameuse et énigmatique partie de tennis finale.
Zabriskie Point (1969). Tourné en lieu et place d'un film sur le Japon, Zabriskie Point constitue d'un point de vue formel et artistique comme le film qui a définitivement figé une certaine imagerie de l'Amérique, celle du road movie, de la contestation et de ses paysages désertiques hypnotiques. Ecrit en collaboraton avec Sam Shepard et Tonino Guerra, Zabriskie Point est éreinté par la critique américaine qui n'y voit qu'un brûlot contestataire. C'est avant tout une fable poétique et métaphorique, traversée de fulgurances visuelles et sonores (lire Jay Z - Antonioni : même combat), un trip visuel et métaphysique qui est parvenu à saisir l'essence des Etats-Unis. Et l'origine de la fascination qu'ils exercent sur nos consciences. Et qui témoigne du goût d'Antonioni pour l'errance – goût qu'il va mettre en pratique artistiquement de manière plus radicale dans la suite de sa carrière.
La Chine Chung Kuo (1971). Tourné après son escapade à dominante américaine, ce documentaire-somme commandé par la Rai et les officiels chinois témoigne du goût du voyage, du risque, de la remise en cause, de l’interrogation d’un homme sur son art et sur ce qui fait d’un homme un homme : la qualité de son regard, la justesse de son propos, l’humilité de sa démarche. A rebours du cliché qui colle à la peau du cinéaste italien - prétentieux, inaccessible et snob, pour aller vite - ce film prouve tout le contraire : tourné caméra à l’épaule, en moins de trois semaines, il fait montre d’une richesse, d’une vivacité et d’une acuité peu communes chez un cinéaste alors âgé de 60 ans, au faîte de sa renommée. Pris à son insu dans les guerres intestines entre les dirigeants chinois et la guerre de succession de Mao, le film resta longtemps inédit et peu diffusé.
Profession : reporter (1974). Alors qu'il ne parvient pas à financer un projet qui tient à cœur à Antonioni depuis 1966, Techniquement Douce, son producteur Carlo Ponti lui propose un scénario de Mark Peploe. Et qu'Antonioni accepte aussitôt. Epique, le tournage se déroule dans quatre pays – Angleterre, Espagne, Allemagne, Algérie – et doit s'adapter aux contraintes d'agenda d'un Jack Nicholson, alors en plein boom. Quête d'identité métaphysique sur fond de suspense et de road movie initiatiques, Profession reporter s'achève sur un plan-séquence fulgurant qui a fait les beaux jours des écoles de cinéma. Ses métaphores visuelles, ses effets de montage, sa beauté plastique (mention à la lumière de Luciano Tovoli) font de Profession reporter un des films les plus personnels d'Antonioni, sur son désir de fuite et son impossible objet, le plaisir de l'abandon et ses impasses, et son goût pour les récits labyrinthiques à la Borges.
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Travis Bickle
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