En salles (le 19 avril) : Il y a des sujets universels : la haine, l’amour, la violence, la peur, la trahison, le respect de la tradition. Et il y a des films qui sont des paraboles. Les Initiés en fait partie. Dans une mise en scène proche du documentaire, John Trengove réalisateur sud-africain blanc, nous interroge sur nos préjugés. Puissant.
Advenir au monde
Adapté de A Man Who is not a Man, premier roman de Thando Mgqolozana, co-scénariste du film, Les Initiés raconte l’Ukwaluka. Ce rite d’initiation traditionnel est pratiqué en Afrique du Sud par l’ethnie xhosa sur les jeunes garçons afin qu’ils deviennent des hommes. Deux fois par an, des groupes d’adolescents quittent ainsi leur communauté pour rejoindre des campements isolés et y être circoncis par les khankathas, les instructeurs. Ils retournent ensuite chez eux changés et accèdent alors aux privilèges de leur sexe.
Une nature brute pour un acte brutal
Bruits sourds du campement, branches qui craquent, chutes d’eau, chants rituels lors des veillées, cette ambiance minérale nous plonge d’abord dans une Afrique du Sud ancestrale. Celle où les références au mode de vie occidental n’existent pas, où seules les croyances fondent. Peu de mots sont échangés pendant le rite et après, mais des liens se créent et perdurent au-delà. Grâce à une mise en scène discrète et sans effet, John Trengove donne à ses personnages et à leurs histoires une grande profondeur. La délicatesse avec laquelle les situations sont chronologiquement filmées contrebalance la rudesse du sujet. Et finalement nous touche au cœur.
Qui es-tu pour juger de ce qui est bon ?
Parce que où que nous soyons et qui que nous soyons, nos soifs sont universelles. Lorsque l’histoire d’amour interdite entre Xolani et Vija, tous deux instructeurs, se révèle à Kwanda jeune initié, c’est toutes nos idées préconçues sur le mensonge, la trahison et la vérité qui s’affrontent. A quel moment suis-je vrai ? Que dois-je sauver : mon désir ou la communauté ? Jusqu’où aller pour préserver un secret ? Ai-je le droit de tout dire ?
Ce film présenté au Festival de Sundance en compétition étrangère et au Festival de Berlin en ouverture, se clôt prophétiquement sur cette parole prononcée en guise d’envoi par un ancien : "Construisez un enclos qui ne soit pas vide". Et si c’était cela, devenir un homme ?
Annie Hall
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