samedi 23 novembre 2013

Georges Lautner : requiem pour un bon


Artistes : Cruelle ironie. En ce 50e anniversaire de la sortie des Tontons Flingueurs, son réalisateur, Georges Lautner, est mort. Il avait 87 ans. Il laisse derrière lui bon nombre de films cultes et une pelletée de grands succès au box-office - les uns n'étant pas incompatibles avec les autres d'ailleurs. Un tour de force en soi. Retour sur une carrière en neuf termes.



Monocle
Le Monocle noir (1961), L'Oeil du Monocle (1962), Le Monocle rit jaune (1964)... une trilogie autour de deux genres que chérira le cinéaste : la comédie et le polar. Le monocle en question, c'est celui que porte le commandant Dromard, agent secret de la IVe République. Un collègue d'OSS 117, quoi. En moins con et plus racé. Interprété par Paul Meurisse, le personnage est droit comme la justice et qui avance par petits bonds, pistolet au poing. Cette démarche bizarre, c'est le seul souvenir que je garde de ces films, découverts sur FR3 ou Antenne 2 au mitan des années quatre-vingts.
  
Tronches
Avec le Lino, Lautner balance du lourd. Du comack. Du culte. Les Tontons Flingueurs (1963) est devenu un mythe. Les dialogues sont récités par coeur par des générations de spectateurs. Audiard au sommet et une belle brochette de tronches : Ventura, Blier, Lefebvre, Blanche, Rich, Dalban, Venantini. Que des cadors, qui se retrouveront  dans Les Barbouzes (1964), un peu trop inspiré des Tontons, un peu moins drôle mais avec quelques moments d'anthologie. Encore plus fort, Ne nous fâchons pas (1966) : le Lino ne contrôle pas ses baffes et Jean Lefebvre en fait les frais. Le film est aussi une belle occasion d'illustrer l'entente cordiale franco-britannique. Michel Constantin est aussi de la partie : gueule burinée, gouaille de parigot. Du brutal au grand coeur qu'on retrouvera dans Il était une fois un flic (1971) et La Valise (1973), géniale comédie d'espionnage au Proche-Orient.

Bébel
Avec Flic ou Voyou (1979), Lautner et Belmondo entament une collaboration fructueuse. Pour ce premier opus, coup de maître. Une histoire glauque qui implique truands, flics ripoux et notables de la Côte d'Azur. Dialogues ciselés d'Audiard et sublime partition de Philippe Sarde (qui fait appel pour l'occasion à Chet Baker). Bébel enchaîne cascades et bonnes vannes pour un de ses meilleurs rôles. Suivra Le Guignolo (1980), qui allie polar et grosse farce : pas complètement réussi mais pas vraiment raté. Puis c'est l'immense succès du Professionnel (1981) qui fait évoluer le flic à la Bébel : plus sérieux, trop sérieux, plus macho, plus physique. Retour à la pure comédie avec Joyeuses Pâques (1984)  et enfin, le drame avec L'Inconnu dans la maison (1992), dernier film de Lautner.
 
Pacha
1968 : la France bouge, pas Jean Gabin. Le flic vieille école enquête sur la mort d'un pote. Un classique dans lequel le patriarche balance du Audiard et quelques regards qui tuent. Grand moment : la rencontre avec Gainsbourg, interprétant Requiem pour un con.

Pop
Lautner filme aussi bien la France à papa que la pop venue d'Outre-Manche. Dans Les Tontons flingueurs, Ne nous fâchons pas ou Le Pacha, la jeunesse danse devant des papis incrédules, voire atterrés - Gabin dans la boîte de nuit, Lino face aux rockers britiches... Et ce n'est jamais tourné en ridicule. Lautner n'avait rien d'un vieux con.

Sauterelle
La muse de Lautner, c'est Mireille Darc. Elancée, grands yeux, tâches de rousseur, l'actrice gagne le surnom de La Grande sauterelle dans le film du même nom, sorti en 1967. Très féminine, Mireille est à l'aise parmi les garçons aux grosses mains velues. Résultat : huit films ensemble.

OCNI
Cet objet cinématographique non identifié s'appelle Sur la route de Salina (1969). Un film atypique, étonnant, inclassable dont a très bien parlé l'ami Travis Bickle (lire : Tous sur la route de Salina).

Maman 
Renée Saint-Cyr, la maman de Lautner, a joué dans onze de ses films. Une vieille dame distinguée capable de jurer soudainement comme un charretier. La classe.

Caméra
Lautner est un excellent directeur d'acteurs. C'est aussi un metteur en scène à la technique irréprochable. D'où des films qui, en général, ont bien vieilli, quand ils ne frappent pas par leur modernité.

Evidemment, il y aurait encore plein de choses à écrire sur Georges Lautner. Cet hommage est modeste mais sincère. Respect, Monsieur Georges et merci pour tous ces grands films.

Anderton

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