vendredi 7 janvier 2022

Onoda : l'un des plus beaux films de 2021 dans une édition vidéo complète

Onoda blu-ray CINEBLOGYWOOD


En Blu-ray et DVD : Après le sublime Diamant noir, Arthur Harari a signé avec Onoda l'une des pépites cinématographiques de 2021. Ce film d'aventure envoûtant, présenté au Festival de Cannes 2021 (Un Certain Regard), est désormais disponible dans une édition vidéo qui comble les cinéphiles.


Comme beaucoup, j'avais entendu parlé d'un soldat japonais qui était resté terré sur une île du Pacifique sans savoir que la deuxième guerre mondiale avait pris fin. J'associais d'ailleurs cette histoire de Robinson Crusoé moderne à Duel dans le Pacifique (Hell in the Pacific, 1968) de John Boorman, qui mettait en scène un G.I. (Lee Marvin) et un soldat japonais (Toshiro Mifune) s'affrontant sur une île abandonnée.

Pour son deuxième long-métrage, Arthur Harari a donc choisi de nous conter l'étonnant destin de Hiro Onoda, qui a passé plus de trente ans dans la forêt d'une île philippine, se préparant au retour de l'armée japonaise. Les idées préconçues que j'avais en tête ont volé en éclat : le guerrier n'était pas seul sur une île déserte. L'île de Lubang était et reste toujours habitée et Onoda a partagé sa "guérilla" avec trois compagnons.

Le regard d'Harari

Ce qui fait la réussite du film, c'est la manière dont le cinéaste s'est approprié le sujet pour le raconter avec un point de vue et un ton tout personnels. Le récit est construit avec des flashbacks et des points de vue qui changent au fil du récit. Cela aurait pu donner lieu à un film mal ficelé ou bancal ; c'est tout le contraire qui se produit. Nous sommes emportés par le récit, à la fois fluide et ponctué par des rebondissements. Un récit qui nous donne autant à vivre cette "robinsonade" atypique qu'à entrer dans l'intimité et la psyché des personnages, au premier rang desquels Onoda, bien sûr.

La mise en scène, la photo (signée Tom Harari, le frère du cinéaste) et le montage participent également à l'envoûtement que provoque le film. La profondeur de champ inscrit les protagonistes dans un environnement à la fois splendide et inquiétant. On ressent l'hostilité d'une nature qui ne se laisse pas facilement domptée. Si elle offre des fruits, ils peuvent contenir du poison. L'eau de pluie, vitale, tombe en déluges ininterrompus. 

Prison végétale, prison mentale

Jamais Arthur Harari ne se laisse engloutir par la jungle. Elle est la compagne omniprésente des soldats nippons mais ce sont eux qui sont bel et bien les "héros" du film. Eux que l'on voit lutter, douter et finalement, tenir. Le cinéaste parvient à nous attacher à des personnages à différentes étapes de leur vie et donc interprétés pour certains par deux acteurs. C'est le cas pour Onoda, incarné par Yuya Endo et Kanji Tsuda. Le premier nous émeut par la rigueur exacerbée et le besoin vital de reconnaissance qu'il confère à son personnage ; le second nous bouleverse par sa fragilité associée à une détermination sans faille. Le regard du comédien et son corps malingre raconte les épreuves traversées par Onoda. "Ton corps est ta patrie", déclare le père d'Onoda alors que son fils s'apprête à partir vers sa mission.

Harari filme des hommes perdus dans un no man's land végétal. Seuls les sages et les fous vivent hors de la cité, nous a enseigné la philosophie grecque. Onoda et ses hommes semblent vivre hors du temps et de la raison, s'accrochant à des ordres caduques et à une conception du monde erronée. Ils nous touchent parce qu'ils se trompent. Et aussi parce qu'ils sont libres.

Le Pacte a soigné l'édition vidéo : un Blu-ray contient le film et un court-métrage d'Arthur Harari tandis que dans le DVD, l'aventure du film - car c'en fut une - est décrite dans trois suppléments passionnants consacrés au tournage (Harari échange avec son directeur de la photo et son 1er assistant), à l'écriture (Harari est entouré cette fois-ci du coscénariste et du monteur) et à la musique. La construction du récit, les choix de mise en scène, l'apport du montage sont ainsi décryptés. Rendons hommage à Harari qui jamais ne tire la couverture à lui : avec son équipe, il démontre à quel point le cinéma est un art collaboratif. Le cinéaste adopte les idées de chacun, dont celle de son producteur Nicolas Anthomé sur la narration, quand il estime qu'elles servent le film. Il expose sa vision mais on comprend qu'il n'a jamais cherché à imposer sa patte pour le seul plaisir de signer un beau plan - même si le film en comprend plus d'un, comme celui où Onoda quitte l'île : Harari filme ses pieds nus qui se détachent de l'herbe alors que le soldat s'assied dans un hélicoptère. Tout est dit.

Laissez-vous gagner par l'envoûtante beauté d'Onoda, l'un des plus beaux films de l'année.

Anderton


2 commentaires:

Joe Le Mort a dit…

Un des plus quoi ? :p

cineblogywood a dit…

Un des plus beaux ! Merci Joe, j'ai rectifié.