Apprécié pour les pépites qu'il présente et sa super ambiance, le Festival du film coréen à Paris (FFCP) fête ses 20 ans du 28 octobre au 4 novembre 2025. CINEBLOGYWOOD a voulu savoir comment s'organisait ce grand rendez-vous des passionnés du K-Cinema. David Tredler, son chef programmateur, déroule les étapes-clés qui ont ponctué l'année écoulée pour aboutir à l'édition 2025.
Nous sommes début novembre 2024, la 19e édition du festival vient de s’achever. Concrètement que se passe-t-il : vous soufflez ou vous faites tout de suite un débrief ?
Le festival s’est terminé le mardi soir et le lendemain, c’est
un peu la journée "gueule de bois". On n’a qu’une envie, c’est dormir
mais il faut retourner aux cinémas Publicis [où se déroule le Festival, NDLR]
parce qu’il y a beaucoup de choses à ranger et désinstaller. On débriefe
également avec l’équipe du Publicis pour savoir comment l’édition s’est
déroulée. En général, toute l’équipe du FFCP se retrouve au restaurant pour fêter
le travail accompli mais le vrai débrief professionnel a lieu début novembre,
le temps de laisser retomber l’adrénaline, la fatigue… Moi, je suis souvent
malade après le festival, le corps lâche un peu.
L’équipe du FFCP, ça représente combien de
personnes ?
Le socle permanent, c’est une quinzaine de personnes auxquelles s'ajoutent des bénévoles qui sont recrutés à l’approche du festival. Au total, lorsque
le festival débute, nous sommes entre cinquante et soixante.
Revenons à début novembre 2024. De quoi parlez-vous lors
du bilan avec l’équipe ?
On dépouille les questionnaires de satisfaction remplis par
le public. On étudie la fréquentation. On a également des comptes à rendre à
nos sponsors, avec quelques dossiers à remplir et renvoyer courant
novembre-début décembre.
Faites-vous aussi un débrief aux distributeurs, producteurs,
talents que vous avez accueillis ?
Bien sûr. Les distributeurs et les vendeurs nous appellent
pour savoir comment ça s’est passé. Les réalisateurs peuvent aussi nous
contacter directement, y compris ceux que nous n’avons pas pu accueillir et qui
nous disent avoir suivi le festival sur les réseaux sociaux.
Pour vous, qu’est-ce qu’une édition réussie ?
Que les entrées en salle aient été bonnes, c’est la base.
Quand les invités sont contents, qu’il y a eu de bons échanges avec le public, c’est aussi une réussite. Et puis, bien sûr, que les spectateurs
soient contents : on le sait lors d’échanges en direct pendant le festival,
en lisant les messages sur les réseaux sociaux ou à travers les questionnaires
de satisfaction.
Alors l’édition 2024, était-elle réussie ? Quelle a
été la fréquentation ?
Sur les huit jours du festival, nous avons enregistré environ
11.000 entrées sur 46 séances. A 50 entrées près, c’est un chiffre qui est
stable par rapport à l’édition 2023, qui était notre record.
Combien de films présentez-vous lors d’une édition ?
Une cinquantaine de courts-métrages et 20 à 25
longs-métrages.
Reprenons le fil. Nous voici en décembre 2024, vous avez
partagé le bilan avec les talents, les distributeurs, les sponsors.
Commencez-vous déjà à travailler sur l’édition 2025 ou y a-t-il une coupure
avec les fêtes qui approchent ?
A partir de mi-décembre, on entre en hibernation. Du point
de vue de la programmation, on réveille la bête début février. Je commence à
recontacter distributeurs, producteurs et vendeurs afin de savoir ce
qu’ils ont dans leur catalogue pour les mois à venir. Et on commence à
visionner des films à partir de fin février-début mars.
Le fait que le festival soit bien installé depuis vingt ans vous
facilite la tâche, j’imagine…
Oui, oui. Je suis arrivé en 2012, à la 7e
édition, et à cette époque, il fallait vraiment insister pour recevoir certains
films. Depuis, on a fait nos preuves. Le festival bénéficie d’une bonne
réputation en Corée aussi. Les producteurs, distributeurs et réalisateurs
coréens ont constaté qu’on faisait bien les choses, qu’on avait un gros public,
que nos invités étaient ravis de l’organisation.
Pour obtenir des films, devez-vous batailler avec
d’autres festivals de films coréens ?
En Europe, il y en a quelques autres, à Madrid, Londres,
Francfort, Bruxelles… ça va, ça vient. Beaucoup d’entre eux sont organisés par
les centres culturels coréens locaux : c’est leur travail alors que nous,
on est une bande de passionnés, on y met toute notre énergie, c’est un peu plus
rock’n’roll. On surveille toujours ce que font les autres festivals mais il n’y
a pas vraiment de compétition entre nous. En général, si on ne peut pas obtenir
un film qu’on voulait, c’est parce qu’il est présenté dans un grand festival
international qui a exigé la première européenne ou internationale.
Nous voilà fin février-début mars 2025. Comment sélectionnez-vous
les films que vous présenterez à l’édition 2025 ?
Nous sommes trois, deux programmateurs – Emmanuelle Spadacenta
et Julien Chardon – et moi, à visionner jusqu’à fin juillet les films que nous
retiendrons pour la section Paysage, qui constitue le panorama du meilleur de
la production coréenne de ces derniers mois, et la section Portrait, qui met en
avant un réalisateur ou une réalisatrice qui sera invité(e) à présenter son
premier film. Entre le Festival de Cannes et juillet, c’est la période où nous
recevons le plus de films. Cette année, nous avons dû visionner 110
longs-métrages pour en retenir une dizaine. Nous continuons les visionnages au
fil de l’été afin de dégoter les films d’ouverture et de clôture ainsi que
trois-quatre gros blockbusters événements.
Visionnez-vous les films ensemble ou séparément ? Comment
échangez-vous vos avis ?
Chacun regarde les films chez soi car c’est un peu compliqué
de faire autrement. Nous échangeons nos avis via une chaîne de discussion et un
tableau de visionnage sur Whatsapp. Je regarde tous les films. Il peut y en avoir
certains que je n’aime pas et que je vais demander à l’équipe de regarder quand
même, pour un deuxième avis. En revanche, il y a certains films dont la qualité
de production, de mise en scène ou d’interprétation ne correspond pas à nos
attentes et là, je leur dis de ne pas perdre de temps à les visionner car on en
a beaucoup à voir en quelques mois. On demande toujours que les films soient
sous-titrés en anglais. Quand j’ai commencé, il y a 12-13 ans, on pouvait
recevoir des films non sous-titrés mais aujourd’hui, les producteurs et
distributeurs font plus d’efforts pour les montrer à l’international.
A quelle période commencez-vous à établir votre sélection ?
On se retrouve en général mi-juillet pour une réunion afin
de sélectionner la dizaine de films qu’on va présenter dans la section Paysage,
plus quelques autres qu’on va garder en plan B au cas où nous ne pourrions pas obtenir
certains des films qui nous ont plu. Commence alors la période de l’acquisition :
nous discutons avec les producteurs, les distributeurs, les vendeurs ou parfois
les réalisateurs pour évoquer le budget, la logistique, éventuellement la venue
des talents. C’est plus ou moins long. Parfois, on leur dit qu’on adore leur
film et c’est bouclé en trois mails et parfois, ça s’étale sur plusieurs
semaines.
La Korea Mania qu’on connaît depuis plusieurs années, ça
facilite les choses ou ça fait monter les enchères ?
Cela fait venir de plus en plus de monde, le public rajeunit
aussi mais au niveau de nos contacts en Corée, je ne saurai pas dire si cela se
traduit par un changement.
Dans le cadre de vos fonctions, êtes-vous amené à vous
déplacer ? Vous avez évoqué le Festival de Cannes mais allez-vous aussi
dans d’autres festivals, comme celui d’Udine par exemple ?
Je vais à Cannes régulièrement, pas tous les ans, mais c’est
surtout ce rendez-vous-là qu’on essaie de ne pas rater car tous les
distributeurs et vendeurs y sont présents. Cela m’arrive ponctuellement d’aller
dans d’autres festivals mais je ne suis jamais allé au Festival d'Udine. Je vais aussi en
Corée, pas tous les ans non plus. J’y étais cet été et j’en ai profité pour
faire quelques rendez-vous soit pour accélérer certains dossiers, soit pour
voir des films, soit pour rencontrer des réalisateurs que je connais.
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Crédit photo : FFCP
Anderton

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