En DVD : Wild Side a étoffé en début de mois son excellente collection Les Introuvables. Parmi les pépites exhumées et remastérisées : Inspecteur de service (1958). Ce film de John Ford, intitulé Gideon's Day au Royaume-Uni et rebaptisé Gideon of Scotland Yard aux States, est un étonnant film policier, qui lorgne vers la comédie. On est a priori bien loin des westerns épiques ou des drames humanistes chers au cinéaste. Et pourtant...
George Gideon est donc flic, à Londres. Et alors qu'il est encore à son bureau, à la nuit tombée, il raconte en voix-off une de ses journées typiques. Entre affaire de corruption, braquages sanglants et scènes de la vie conjugale. Ce sont cette absence de fil conducteur et ces changements de ton (comédie, polar) qui ont dérouté le public américain, condamnant le film à être renommé puis oublié. Ben, je vais vous dire : c'est justement tout ce qui m'a plu !
Cavalerie londonienne
Ford alterne les tranches de vie en les traitant comme autant de séquences aux atmosphères bien marquées. Oubliez ici les récits en trois parties, avec chute, rédemption et autres ficelles scénaristiques. La journée avance, apportant son lot de surprises, de rencontres, de frustrations professionnelles, d'action et de petites joies familiales. Certes, la représentation de la femme (mère au foyer soumise, séductrice, victime) fera grincer quelques dents ; de même que certains individus frôlent la caricature (l'artiste incompris qui devient criminel, le flic à moustache droit dans ses bottes...). Reste qu'on retrouve tout l'humour de Ford et son humanisme, sa bienveillance dans le traitement des personnages et la manière qu'il a de les faire interagir.
Quant à Gideon, ce n'est pas un héros : il ne fait que son devoir tout en essayant de préserver sa vie de famille. On est dans le droit fil des films de cavalerie (La Poursuite infernale, La Charge héroïque...) de Ford, comme l'explique Samuel Blumenfeld dans un bonus très éclairant. D'ailleurs, Jack Hawkins, vu dans Le Pont de la rivière Kwaï (1957), Ben-Hur (1959) ou Lawrence d'Arabie (1962), porte le film sur ses épaules : il incarne à la perfection ce père et mari aimant, flic honnête et retors, au caractère bourru mais au coeur d'or.
Oeuvre méconnue mais étonnante, Inspecteur de service se déguste comme une tasse de thé fumant allongé d'une lampée de gin.
Anderton
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