En salles : Retour sur une année de films découverts sur grand écran. Pour ce Top 10, j'ai retenu... 12 films. Et j'ai décidé de ne pas les numéroter. Voici donc mes coups de coeur de l'année 2017.
The Lost City of Z (James Gray)
Après dix ans de tentatives avortées, James Gray nous livre enfin le grand œuvre dont il rêvait, l’adaptation du roman de David Grann, The Lost city of Z. En seulement six films, il s’est imposé depuis une quinzaine d’années comme l’un des grands héritiers du cinéma classique hollywoodien. Lui manquaient la prise de risque, l’audace, l’exploration. C’est désormais chose faite, avec un brio, une maîtrise et une maturité qu’on n’attendait plus de la part de celui qui nous avait un peu déçus avec son précédent film, The Immigrant. Un tournant majeur dans une œuvre jusque-là dominée par les univers urbains et le polar. Un chef d’œuvre majestueux et tortueux, aventureux et intime, lyrique et tourmenté.
Happy end (Michael Haneke)
Michael Haneke nous livre une œuvre majeure – en tout cas, une œuvre somme, satirique et mordante, grave et sombre, un précis de décomposition familiale et civilisationnelle, comme il sait si bien les filmer – qu’on se souvienne de Le septième continent ou de Funny games. Mais grande nouveauté : le cinéaste autrichien a décidé de nous faire rire et de nous émouvoir - certes, avec pas mal de grincements de dents et une bonne dose d’absurdité. Et s’inscrit dans la lignée des grands cinéastes étrangers qui n’ont peut-être jamais mieux ausculté la société française dans tous ses aspects : Polanski, Bunuel, Losey ou, plus récemment, Verhoeven.
Gabriel et la montagne (Fellipe Barbosa)
Présenté à Cannes dans le cadre de la Semaine de la Critique, Gabriel et la montagne est le deuxième film du cinéaste brésilien Fellipe Barbosa, après le remarqué Casa Grande. Loin d’un brûlot altermondialiste ou d’un réquisitoire anti-occidental, derrière cet intriguant projet de reconstitution du périple d’un enfant gâté aux confins de l’Afrique se cache un film fascinant sur la résurrection d’un ami décédé. Manière de célébrer les vertus magiques du cinéma, qui non content de filmer la mort au travail, permet de ressusciter d’entre les morts. Renversant.
A Ghost story (David Lowery)
Le tour de force narratif et formel de l’année ? Un conte universel sur le deuil et la mélancolie, visuellement et narrativement renversant, élégiaque et bouleversant, dont la simplicité et le minimalisme du pitch sont inversement proportionnelles à l’élégance formelle et l’audace visuelle. Avec l’aide de ses deux acteurs au charisme inouï, Casey Affleck et Rooney Mara, qu’il avait déjà précédemment réunis pour son premier film, Les Amants du Texas, David Lowery s’inscrit d’emblée dans la liste des plus grands cinéastes contemporains.
La La Land (Damien Chazelle)
Après le déjà formidable, mais très noir, Whiplash, Damien Chazelle confirme tous les espoirs qu’on avait en lui avec ce La La Land qui renoue avec le secret - qu’on croyait perdu - des grandes comédies musicales des années 50. Mieux : en y intégrant l’héritage de Jacques Demy, il transcende le genre et nous offre le plus beau cadeau qu’on pouvait rêver en ces temps de crise : euphorique et sombre, joyeux et mélancolique. Qui redonne au cinéma une place centrale dans un monde marqué par la profusion d’images en tout genre : celle d’augmenter la réalité et de la rendre un tout petit peu plus belle.
120 Battements par minute (Robin Campillo) / L’Atelier (Laurent Cantet)
Deux regards, deux gestes forts sur la société française, l’un en mode épique, l’autre en mode mezza voce. Qui tous deux entrecroisent l’intime et le collectif, le politique et le domestique, les adultes aux jeunes générations. Comme si les uns n’allaient jamais sans les autres. Comme quoi, politique et cinéma français font excellent ménage. Deux œuvres de deux créateurs singuliers, Robin Campillo et Laurent Cantet, qui ont tous deux collaboré au film de l’autre, et qui nous permettent de découvrir de nouveaux visages, Nahuel Perez Biscayart, Arnaud Valois et Matthieu Lucci.
Le Musée des merveilles (Todd Haynes)
Deux ans après Carol, le réalisateur américain Todd Haynes nous livre un drame onirique, véritable odyssée dédiée au cinéma et à l’enfance, au-delà des limites du temps et de l’espace, illustrée par ce précieux adage au centre du film : "Nous sommes tous dans le caniveau, mais on regarde quand même les étoiles". En adaptant le roman graphique de Brian Selznick, auteur de Hugo Cabret, c’est l’occasion pour le réalisateur de faire preuve d’une maestria narrative et de déclarer sa flamme au cinéma dont il reproduit les procédés et les genres. Noir et blanc, film muet, couleurs et musique des 70’s, quête initiatique, drame, film d’aventures, comédie, films d’animation, sa mise en scène est un véritable feu d’artifice visuel et esthétique.
11 minutes (Jerzy Skolimovski)
Au-delà de la catastrophe finale, le dernier géant du cinéma polonais Jerzy Skolimovski semble chuchoter à l’oreille du spectateur qu’il est temps de tenir compte enfin de la vie de nos proches et de ceux qu’on aime. Message bouleversant d’un cinéaste quasi-octogénaire en pleine possession de ses moyens, qui livre là une œuvre cinématographique à l’impact émotionnel et pictural à nul autre équivalent.
Le Sens de la fête (Olivier Toledano et Eric Nakache)
Après Samba, semi-déception esthétique et commerciale, le duo Toledano-Nakache revient à son meilleur avec cette comédie chorale pétillante et poétique, au centre de laquelle trône un Jean-Pierre Bacri impérial. Pitch imparable, sens du timing, précision des dialogues, casting aux petits oignons, sans oublier ce qui manque cruellement à la comédie française, sauf exceptions : un sens de la mise en scène, une attention portée à la lumière et au décor. Le cinéma populaire est à la fête !
Blade Runner 2049 (Denis Villeneuve) / Dunkerque (Christopher Nolan)
Deux exemples du savoir-faire hollywoodien : des sujets risqués, d’énormes moyens, aux mains de cinéastes à l’univers visuel extrêmement fort, des films d’une incroyable richesse narrative et formelle qui avancent à contre-courant de la production lambda, des plans magnifiés par le génie de leurs chefs opérateurs, immersifs et audacieux. Quelques scories ça et là ne les empêchent pas de figurer parmi les œuvres les plus marquantes de l’année.
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