dimanche 9 septembre 2018

Comme un chien enragé : un face-à-face Penn-Walken d'anthologie

En DVD et Blu-ray : Si je vous dis "Foley", il y a de fortes chances que vous pensiez à Axel, le personnage interprété par Eddie Murphy dans Le Flic de Beverly Hills. Mais en l'occurrence, je vais vous parler de James Foley, bien réel celui-ci, même s'il avait un peu disparu de mes radars. Après une carrière en dents de scie dans les années 1990 et 2000 et un passage à vide de plusieurs années, le cinéaste a retrouvé le devant de la scène (ou plutôt, le derrière d'une caméra) en réalisant quelques épisodes de House of Cards puis les deux suites de 50 Nuances de Grey. Carlotta a eu la riche idée de sortir en vidéo l'un de ses premiers et tout meilleurs films : Comme un chien enragé (At Close Range, 1986), avec Sean Penn et Christopher Walken. Et Madonna en embuscade.


Porté par Sean Penn, Comme un chien enragé est tiré d'une histoire vraie. Dans une petite ville d'un coin rural de Pennsylvanie, le jeune Brad Whitewood Junior (Sean Penn) passe l'essentiel de son temps entre virées en bagnole et glande devant la télé, avec bières et pétards à portée de main. Son univers morne s'illumine avec l'apparition de Terry (Mary Stuart Masterson). Le coup de foudre est réciproque. C'est alors que son père, Brad Senior (Christopher Walken), qui a depuis longtemps abandonné le foyer familial, revient se manifester, avec des billets de dollars pleins les poches. Méprisé par la mère de Brad, le paternel est un mauvais garçon, à la tête d'une bande de voleurs. Il tente de renouer avec ses fils : Brad Jr reste méfiant tandis que son frère Tommy (Chris Penn) ne cache pas son admiration.


Je n'avais pas revu ce polar depuis sa découverte en VHS, à la fin des années 80. Et je dois dire qu'il n'a pas pris une ride. Au contraire ! A l'époque, le film avait été en partie vampirisé par sa chanson-titre, Live To Tell, interprétée par Madonna, et par la romance que vivait la Ciccone avec Sean. Chanson dont diverses variations instrumentales composent d'ailleurs la bande originale du film. Bonne surprise, synthés et rythmes so 80's tiennent la route en même temps qu'ils contribuent à donner au film une atmosphère où percent l'ennui et la menace.

Cette ambiance cafardeuse, James Foley parvient à l'imprimer sur pellicule en posant sa caméra dans un centre-ville à moitié désert, dans une maison décrépie (celle des Whitewood), devant des champs de maïs, dont les épis forment d'épaisses murailles. Autant de lieux qui donnent l'impression que les jeunes vivent en vase clos sans opportunité d'en sortir. Voilà pour l'arrière-plan, car le cinéaste s'intéresse avant tout à ses personnages, qu'il filme au plus près. Gros plans sur leurs visages où affleurent les émotions, comme un coup de vent sur la surface d'un étang.

Opposition de styles

Dans un jeu très rentré, Sean Penn incarne un branleur plein de morgue que l'amour va transfigurer. Son visage s'illumine face à celui de Mary Stuart Masterson - et vice versa. Le couple fonctionne. Et il faut tout le talent de Penn pour donner de la profondeur à son personnage, dont la sensibilité se révèle progressivement. Quant à Christopher Walken, il livre (une fois de plus) un numéro dont lui seul est capable, incarnant une sorte de beau bizarre, à lunettes de soleil et moustache, hypnotisant et dangereux comme un serpent. Les seconds rôles sont au diapason du duo en tête d'affiche : Crispin Glover campe remarquablement un ado rebelle tandis que Chris Penn joue une grosse brute qui nous touche à force de vouloir plaire à son père (jusqu'à une ultime réplique déchirante). Tracey Walter (une gueule du ciné US vue dans le Batman de Tim Burton ou Erin Brockovich) joue une fois de plus un magnifique loser. Quant à David Straithairn (génial dans Les Experts où il incarnait un compagnon aveugle de Robert Redford) et au très jeune Kiefer Sutherland, ils ont des petits rôles remarqués.

L'édition de Carlotta Films propose Comme un chien enragé dans une nouvelle restauration HD, qui magnifie la photo de Juan Ruiz Anchia. En bonus, un entretien avec James Foley qui revient avec beaucoup d'honnêteté sur sa filmographie inégale ainsi que sur le tournage du film, l'opposition de style (ou plutôt de méthode) entre Penn et Walken, mais aussi la chanson de Madonna, dont il réalisera le clip. Lequel figure à ses yeux parmi ses réalisations les plus réussies.



Foley explique aussi pourquoi House of Cards et les 50 Nuances lui ont permis de démontrer qu'il était encore capable de réaliser des films à grands budgets. Avant de conclure qu'il n'avait pas encore réalisé son chef-d'oeuvre.

Outre le combo Blu-ray + DVD du film, l'édition Prestige comprend le fac-similé du dossier de presse d'époque, l'affiche du film (40 x 60) et 8 reproductions de photos d'exploitation d'époque.

Anderton


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