lundi 19 novembre 2018

Au Poste ! : enquête de non sens

En DVD et Blu-ray : Quentin Dupieux n'est pas un monsieur oisif. Musique, clips, films... le bonhomme est un artiste complet. Après Réalité (2015), le voici de retour avec Au Poste !, désormais disponible en vidéo. Face à face entre Benoît Poelvoorde et Grégoire Ludig dans un film qui rend davantage accessible l'univers bien barré du cinéaste.



Un poste de police. Le commissaire Buron interroge Louis Fugain, suspecté d'avoir assassiné un homme. Fugain clame son innocence mais Buron est décidé à mener l'interrogatoire jusqu'au bout de la nuit.


En choisissant pour son film une affiche qui évoque celle de Peur sur la ville (laquelle évoquait celle de Bullitt), Quentin Dupieux annonce qu'il souhaite placer Au Poste ! dans la lignée d'un certain cinéma populaire français. On pourrait penser à un clin d'oeil, voire une moquerie, mais je ne crois pas. Plus qu'au Bébel triomphant époque René Chateau, Dupieux rend hommage à Garde à vue pour cette confrontation en salle d'interrogatoire ainsi qu'à Buffet froid et Playtime pour ces extérieurs nocturnes au pied de bâtiments en béton aux formes futuristes (et donc datées). Dans le commentaire audio, le cinéaste explique d'ailleurs avoir tâtonné le premier jour de tournage avant de choisir la bonne focale de caméra qui donnerait le ton de sa mise en scène.

Une ambiance familière donc pour un récit un peu moins déroutant que ceux de ses précédents longs-métrages. Pour autant, Dupieux installe à nouveau son univers qui mêle non sens et absurdité, où l'humour naît de l'inattendu, où la blague est empreinte de poésie. Vice versa et inversement. Il y a d'abord cette galerie de personnages, une fois de plus bien écrits et bien castés. Benoît Poelvoorde en flic méfiant trouve le ton juste, ni trop éteint ni trop extravagant. Marc Fraize campe un adjoint borgne un peu barré qui est maqué avec une collègue frisée un peu ch'ti - formidable Anaïs Demoustier. Philippe Duquesne interprète un archétype de policier carré, précis tandis que Jeanne Rosa joue une collègue horripilante. Il y aussi Franchet (Jacky Lambert), grand flic taiseux et un poil inquiétant. Au sein de cet asile de dingues, Grégoire Ludig incarne avec brio... la normalité : voix monocorde, grand calme, expression d'étonnement permanent face à la tournure des événements. Jusqu'à ce que son personnage, lui aussi, révèle sa dinguerie. Il y a aussi Orelsan qui tient un petit rôle, Michel Hazanavicius qui fait une apparition muette et Alain Chabat, dont on découvre au générique qu'il a poussé le cri de la victime.





Tous les acteurs disent avec justesse le dialogue écrit par Dupieux. Des phrases pas toujours simples associées à des banalités répétées en boucle. Répliques, situations, interprétations nous surprennent autant qu'elles nous font franchement marrer, c'est pour ça. Ajoutez une belle photo et des décors chiadés. Le film est une grande réussite. L'édition vidéo idem. Outre le commentaire sympa de Dupieux, Diaphana nous propose en prime un supplément sur les répétitions des acteurs en plateau ainsi qu'à bonus caché et une lettre de motivation (comprendront ceux qui ont vu ou verront Au Poste !). Si ça donne pas envie...

Anderton 

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