En DVD et Blu-ray : C'est une comédie culte de mon adolescence que Paramount Pictures réédite en vidéo. La Folle journée de Ferris Bueller (Ferris Bueller's Day Off, 1986), réalisé par John Hughes, avec Matthew Broderick dans le rôle principal, tient-il toujours la route, plus de trente ans après sa sortie ? Ma réponse est un cri : OUI !
L'histoire est simple : Ferris Bueller est un lycéen qui décide de faire l'école buissonnière. Comme il s'agit de sa dixième absence de l'année, et donc probablement la dernière car ça commence à se voir, Ferris d'en faire une journée très spéciale, à passer en compagnie de sa petite amie et de son meilleur pote. Encore faut-il qu'il arrive à ne pas se faire gauler par ses parents, sa soeur jalouse ou le proviseur.
Les cinéphiles le savent, de Seize bougies pour Sam à Breakfast Club, en passant par Rose bonbon ou Maman j'ai raté l'avion, John Hughes a su, comme scénariste ou réalisateur, raconter avec une belle sincérité les joies, les doutes et les peines de la jeunesse. Qu'ils soient exubérants, fragiles, têtes à claques ou torturés, ses personnages ados ne sont jamais caricaturaux. Et s'ils sont ancrés dans leur époque, le portrait que le cinéaste en fait se révèle intemporel. La grande réussite de Ferris Bueller tient justement aux personnages.
Triangle & compagnie
Ferris, c'est le type cool du lycée dont on aurait tous voulu être l'ami... ou qu'on aurait voulu être. Un charmeur capable d'aller très loin dans son délire et qui retombe toujours sur ses pattes. Manipulateur mais jamais méchant, il ne cherche pas à humilier ceux qui se mettent en travers de son chemin. Jouisseur mais pas égoïste, il imagine des frasques et coups tordus auxquels il associe ses amis, cherchant même à les rendre (plus) heureux. Matthew Broderick (WarGames, Biloxi Blues, Glory) lui donne vie avec beaucoup de naturel et de grâce. En un regard, un sourire, il nous fait craquer et devient notre best buddy à vie. D'autant qu'il brise le "quatrième mur" en s'adressant aux spectateurs droit dans les yeux. C'est certainement l'un des meilleurs rôles de Broderick. Alan Ruck (Spin City) interprète Cameron, le BFF de Ferris : un ado négligé par ses parents, mal dans sa peau, qui accepte finalement de sécher lui aussi les cours. Avec son visage expressif, traversé parfois de grimaces de gamin, Ruck anime son personnage de toutes les émotions : le désespoir, la joie pure, le stress... Il est touchant. Quant à Sloane, la petite amie de Ferris, elle est un peu moins "étoffée" : jolie, plus sage, davantage en retrait... mais Mia Sara (Legend) fait le job.
A partir de ce trio, John Hugues crée un triangle relationnel dynamique : Cameron et Sloane admirent Ferris mais ne se privent pas de lui envoyer quelques piques. Et Ferris est loin d'être Mr Perfect, ses doutes font parfois surface. Les autres rôles sont tout aussi réussis : Jeannie, la soeur qui enrage de voir son frère tromper son monde et toujours s'en tirer, est interprétée par Jennifer Grey (Dirty Dancing), dont les moues et roulements d'yeux font notre bonheur. Jeffrey Jones (Amadeux, Beetlejuice) incarne le proviseur pas très futé et imbu de son autorité qui va passer, lui, une sale journée. Un rôle très physique que le comédien rend hilarant. Les parents de Ferris sont gentils et n'y voient que du feu. Le père (Lyman Ward) est une sorte de grand dadais pas bien méchant... Un daron, quoi ! Signalons aussi quelques seconds rôles très marrants : la secrétaire de l'école, le prof à la voix monocorde, le garagiste, le serveur au restau... et une apparition sympa du jeune Charlie Sheen dans un rôle prémonitoire.
Sweet home Chicago
Au-delà de ces personnages bien brossés, John Hughes signe un scénario ciselé où les rebondissements s'enchaînent, les gags fusent et l'émotion perce aussi - sans en faire des tartines, sur le mal-être adolescent. La mise en scène est inventive et rythmée (Hughes maîtrise l'art du montage), accompagnée par une B.O. qui associe standards et morceaux de l'époque - lesquels résistent bien au temps, ce qui n'est pas toujours le cas pour les films des 80's. Il y a beaucoup de moments cultes, notamment un défilé en ville que Ferris détourne et rend mémorable. La séquence m'a rappelé, jusque dans la chorégraphie, celle où Jake et Elwood rendent visite à Ray Charles dans Les Blues Brothers (John Landis, 1980), avec ce moment où le film bascule dans la comédie musicale
Hugues rend d'ailleurs un bel hommage à Chicago, ses gratte-ciel, son musée d'art (formidable séquence poétique qui met en valeur la beauté des oeuvres exposées) et ses habitants. On en voit des trognes ! Et je ne parle pas que des seconds rôles mais aussi des figurants. Le film dégage une énergie communicative. Il file la pêche et la banane !
Quant à cette édition Blu-ray, elle est chargée en bonus : making of, entretiens (d'époque et réalisés en 2006) avec le réal, le casting et le producteur. On découvre que Broderick et Ruck étaient déjà amis et jouaient ensemble au théâtre, que Hugues (qui arborait un mulet waddlesque en 1986) a écrit son script en quelques jours pour anticiper une grève des scénaristes, que les acteurs interprétant les parents Bueller sont tombés amoureux et se sont mariés (avant de divorcer en 1992). Et il y a aussi un focus sur Ben Stein, qui incarne le prof neurasthénique. Sa phrase "Bueller. Bueller" l'a rendu célèbre.
Or, le bonhomme, qui a joué ce rôle grâce à un ami, avait derrière lui une longue carrière de communicant (il a écrit des discours pour Nixon) et de journaliste, après avoir été diplômé de Yale ! Le portrait omet en revanche un certain nombre de prises de position polémiques (cf sa page Wikipedia).
Restons-en à cette Folle journée de Ferris Bueller. Je l'affirme haut et fort : il s'agit d'une des meilleures comédies de John Hughes et même d'une des meilleures comédies tout court. Ce Blu-ray est un must have.
Anderton
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