Sorti en salles mercredi, Infiltrée (Cadejo blanco) est un polar tendu qui nous transporte au coeur d'un gang d'Amérique centrale, dans les pas d'une jeune femme que rien ne destinait à devenir criminelle.
Guatemala City. Sarita se laisse convaincre par sa soeur Bea d'aller en boîte où elle doit avoir une discussion sérieuse avec son copain, Andres. La discussion tourne mal, Bea est effondrée. Sarita lui propose de rentrer mais Bea refuse. Les deux soeurs se disputent. Sarita s'en va seule. Le lendemain matin, elle découvre que Bea n'est pas rentrée. La police n'en a cure. Sarita décide d'aller trouver Andres, qui ne la connaît pas. Le garçon est méfiant, il est membre d'une mara, un gang. Sarita demande à intégrer la clique afin de découvrir ce qu'il est advenu de sa soeur.
Comme tout bon polar qui se respecte, Infiltrée brosse un tableau sans concession de la société dans laquelle il se déroule. Au Guatemala, la vie a peu de valeur, surtout celle des femmes. Pour autant, le réalisateur américain Justin Lerner ne tombe jamais dans le voyeurisme ni la complaisance. Le quartier populaire où vivent Sarita et Bea n'a rien de miséreux et on le découvre à travers ses habitantes, les deux soeurs, leur grand-mère qui les élève, une voisine... On ressent beaucoup de dignité chez ces femmes, notamment chez la très sage Sarita.
Sarita seule contre tous
Dans sa quête pour retrouver sa soeur, elle va devoir affronter des figures masculines qui expriment toutes une soif de domination, une brutalité plus ou moins violente. Il y a le petit copain de Sarita, un jeune bourgeois des beaux quartiers qui vient s'encanailler dans le ghetto ; Andres et Damian, les bras armés impitoyables du gang ; le terrifiant chef de gang et ses ennemis tout aussi maléfiques. Sarita paraît presque frêle mais elle fait preuve d'une incroyable détermination qui lui permet de survivre dans cet univers où la mort est omniprésente. Elle rejoint au panthéon cinématographique les héroïnes martyrisées qui se sont transformées en justicières implacables (Kill Bill, Revenge, Promising Young Woman).
Formidables acteurs qui incarnent des êtres dont la jeunesse a été souillée : Karen Martinez (Sarita), Rudy Rodriguez (Andres) et Brando Lopez (Damian), qui nous avait ému dans le bouleversant Rêves d'or. Chacun parvient à nous faire sentir ses fêlures, ses souffrances.
Le cinéaste a choisi un rythme un peu lent et une mise en scène sans esbrouffe. Il instille ainsi une tension permanente, qui frôle le surnaturel. D'ailleurs le titre original, Cadejo blanco, évoque un esprit protecteur qui prend souvent la forme d'un chien blanc (cela aidera à comprendre une des scènes clés du film). Dans cette ambiance réaliste et quasi magique, propre à l'Amérique latine, on sent que tout peut arriver, et c'est le cas. Comment Sarita va-t-elle parvenir à se faire accepter par la mara ? Comment va-t-elle se sortir de cette situation impossible ? On tremble pour elle, on admire son courage. Infiltrée est une belle découverte.
Anderton
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire