Artistes : A 89 ans, Lauren Bacall vient de nous quitter après une carrière qui s’étale de plus de 50 ans ! Car trop souvent associée « seulement » au couple mythique qu'elle forma à la vie et au cinéma avec Humphrey Bogart, Lauren Bacall a une carrière d'une longévité et d'une diversité rares auprès des actrices de sa génération.
Films mythiques des années 40 et 50 (Hawks, Huston, Sirk), mais aussi oeuvres classiques (Lumet) et iconoclastes (Altman, von Trier), elle aborde quasiment tous les genres, avec un atout unique : sa présence animale et féline, qui marquent chacune de ses apparitions. A ce magnétisme s'ajoute une voix à nulle autre pareille, rauque, charmeuse, qui l'a amenée notamment à la fin de sa carrière à doubler aussi bien Le Château ambulant que Ernest et Célestine. Enfin, elle n’a pas eu peur de prendre des risques – je ne parle du film qu’elle tourna sous la direction de BHL ! Mais à l’inverse de beaucoup de ses collègues, elle n’a pas hésité à monter sur les planches à Broadway, avec de gros succès – notamment une version de All about Eve, intitulée Applause. Sans parler de quelques caméos dans Misery de Rob Reiner, ou dans la série des Sopranos (voir la vidéo).
Une artiste complète, donc, qu’il ne faudrait pas réduire à sa seule dimension glamour et Hollywood. Elle qui redoutait que « sa nécro ne parlerait que de Bogart » (itv Vanity Fair en 2011) peut être rassurée... Flashback sur sa carrière.
Le Port de l'Angoisse (1944) d'Howard Hawks, d'après Ernest Hemingway : « Just whistle ! » avec cette réplique adressée à Boggie-à-qui-on-ne-fait-plus, elle entre directement dans la légende du cinéma, à 19 ans tout juste. Premieer rôle qui déterminera le reste de sa carrière, à son insu. Elle épouse Humphrey Bogart de 25 ans son aîné, dans la foulée du tournage, le 21 mai 1945.
Le port de l'angoisse - Just whistle by RioBravo
Le Grand Sommeil (1946) d'Howard Hawks. Le cinéaste reconduit le couple mythique pour adapter au cinéma le roman de Raymond Chandler. Intrigue à prétexte pour faire une variation sur le sujet de prédilection de Hawks : la guerre des sexes, les joutes hommes-femmes, via des répliques à double sens dont se gargarise l'actrice. Une référence du film noir.
Key Largo (1948) de John Huston : dernier des 4 films qu'elle joue avec son époux. A la fois huis clos, film noir et film catastrophe, Key Largo est un sommet dans l'oeuvre de Huston. Qui grave dans le marbre l'univers du cinéaste : désabusement, cynisme et focus sur des losers magnifiques.
Ecrit sur du vent (1956) de Douglas Sirk. Changement de registre pour l'actrice, qui s'insère avec passion dans l'univers flamboyant du cinéaste. L'un des plus grands mélos du cinéma qui a pour cadre les familles texanes qui ont fait fortune dans le pétrole. Tiraillée entre Robert Stack et Rock Hudson, Lauren Bacall modifie son image en se montrant fragile et passionnément amoureuse.
Prêt à porter (1994) de Robert Altman : deuxième incursion de Lauren Bacall dans l'univers d'Altman, après Health (1980), resté inédit en France. Dans cette satire chorale du monde de la mode jouissive et sarcastique, elle y joue une ex-directrice de Vogue, devenue... daltonienne !
Le Jour et la Nuit (1997) de Bernard-Henri Lévy. Nanar philosophique, baudruche existentielle, au casting qu'on dirait tiré au hasard : Delon, Dombasle, Beauvois, Karl Zéro. Et donc, Lauren Bacall, qui se demande ce qu'elle peut bien faire là. Heureusement, les plages du Mexique mettent en relief sa beauté. Le film à oublier dans sa filmographie...
CINE"LE JOUR ET LA NUIT" by ina
CINE"LE JOUR ET LA NUIT" by ina
Dogville / Manderlay (2003/2005) de Lars von Trier. Bel exemple de la prise de risque de Lauren Bacall avec le diptyque du Danois consacré aux Etats-Unis et à la dénonciation de deux de ses tares : l’esclavage, la violence et la religion. Elle y incarne Ma, un personnage résolument passéiste. Beau casting (Nicole Kidman, James Caan, Ben Gazzarra, Paul Bettany, Danny Glover, Willem Dafoe) pour ce trip expérimental.
Travis Bickle
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