vendredi 1 janvier 2016

Star Wars : George Lucas dérape et s'excuse

Artistes : George Lucas a laissé parler son côté obscur, qualifiant Disney d'"esclavagistes blancs"... avant de s'excuser platement. Des propos qui soulignent à quel point le père de Star Wars vit mal d'avoir abandonné sa création.



Dans une interview TV à Charlie Rose, Lucas a indiqué qu'il était dans la situation d'un père qui avait "vendu [ses "enfants"] aux esclavagistes blancs qui prennent ces choses, et...". Lucas n'a pas terminé sa phrase, sentant peut-être déjà qu'il était allé trop loin. Lui qui a par ailleurs critiqué la nouvelle équipe - en l'occurence, Disney, mais aussi Kathleen Kennedy, la nouvelle présidente de Lucasfilm, ainsi que J.J. Abrams - pour avoir voulu "faire un film rétro". "Je n'aime pas ça, a-t-il indiqué au journaliste. J'ai travaillé dur pour [faire des films] différents. Je les ai fait complètement différents : des planètes différentes, des vaisseaux différents pour faire quelque chose de nouveau." 


Hier, rétropédalage ! Dans un communiqué que reprend THR, George Lucas s'excuse pour s'être mal exprimé et avoir fait "une analogie très déplacée" : "J'ai travaillé avec Disney pendant 40 ans et les ai choisis comme gardiens de Star Wars car j'ai un grand respect pour l'entreprise et le leadership de Bob Iger [le patron de Disney, NDLR]. Disney réalise un incroyable boulot pour s'occuper de la franchise et la développer. Je fais rarement de déclaration pour clarifier mes sentiments mais je sens que c'est important de clarifier que je suis très heureux que Disney ait la franchise et prenne de telles directions excitantes au cinéma, à la télévision et dans les parcs. Et surtout, je suis stupéfait par le succès record du nouveau film et je suis très fier de J.J. et Kathy".

Comment interpréter ce cafouillage ? Plusieurs pistes.

Un nouveau désespoir
Ce qui est intéressant, c'est que cette interview à Charlie Rose a été accordée avant la première de l'Episode VII. Lucas s'est ainsi fait le porte-voix d'une partie des critiques à l'encontre du Réveil de la Force. Certains fans et journalistes reprochent en effet au film d'avoir abusé de références à la trilogie originale (un travers d'Abrams... cf Super 8, truffé d'hommages au cinéma de Steven Spielberg), voire d'avoir fait un grand mix de l'histoire des épisodes IV à VI (voir notamment la vidéo de Nicholas Spargo). 

La preuve que cet univers, Lucas le connaît dans les moindres détails : il l'a muri pendant plusieurs années, développant ses idées parfois en parallèle avec l'avancée de la préproduction. Lucas devait d'ailleurs faire office de consultant sur les nouveaux films mais cela s'est avéré impossible. Il suffit de relire les excellents Making Of de la saga pour comprendre à quel point Lucas lançait les idées, validait les concepts, participait aux tournages, décidait du montage... Bref, c'était lui le boss absolu. Cela n'aurait pas pu fonctionner avec Abrams.

Et puis que dire de l'attente immense des millions de fans forcément exigeants ? Normal que J.J. se fasse critiquer. Son film ne sera jamais aussi bon que les épisodes IV à VI. Car au-delà de la qualité des films, la nostalgie est passée par là. Et il ne faut pas oublier que Lucas lui-même a été vertement critiqué pour ses choix (cf plus bas). Si Le Réveil de la Force réutilise beaucoup de situations tirées de la trilogie originale, il faut également se souvenir que Le Retour du Jedi avait été critiqué lors de sa sortie : encore une Etoile de la mort, des Ewoks juste bons à faire vendre des jouets, et toujours cette quasi-absence de comédiens de couleur...

Une contre-attaque qui empire
Pour autant, la sortie de Lucas passe mal. Après tout, c'est lui qui a décidé de céder à Disney Lucasfilm et les droits de Disney en 2012. Pour la coquette somme de 4 milliards de dollars ! Si Disney est un "négrier", Lucas est un père indigne puisqu'il n'a pas hésité à lui vendre ses "kids".

Le Retour du jaloux
Difficile de ne pas voir dans l'attitude de Lucas l'expression d'une jalousie alors que le premier film de la saga fait en dehors de son giron cartonne au box-office : déjà plus d'un milliard de dollars de recettes dans le monde, relève Forbes.

"Luke, George est amer"
Surtout, le mogul ne se remet pas de voir son oeuvre lui survivre. Fin novembre, Lucas avait déjà indiqué se sentir dans une position "bizarre", comme le relate TechInsider : "Je dois aller au mariage. Mon ex sera là, ma nouvelle femme sera là, mais je vais devoir prendre une longue respiration, assister à tout ça et apprécier le moment, parce que c'est comme ça et c'est une décision consciente que j'ai prise". Motif : Lucas se disait fatigué d'être constamment critiqué par les propres fans de la saga."Tu vas faire un film et tout ce que tu fais est critiqué, a-t-il indiqué à Vanity Fair. Et ce n'est pas très marrant. Vous ne pouvez pas savoir ce que c'est." Lucas a été accusé d'avoir terni sa propre saga en retouchant constamment sa trilogie (et notamment ses effets spéciaux) et en signant une prélogie trop froide (CGI omniprésente), truffée de personnages et scènes ridicules (LEAVE JAR JAR BINKS ALONE !).

George Lucas a clairement dérapé et ce n'est pas la première fois. Pour autant, je ne participerai pas à l'halali : ce type a inventé un univers d'une richesse incroyable, imposant sa vision à un studio qui ne la comprenait pas (la Fox), investissant son argent pour réunir une équipe de talents qui a révolutionné le cinéma hollywoodien. Aujourd'hui, il doit accepter que Star Wars prenne une autre direction, au sein de la machine hollywoodienne qu'il a toujours combattue.

Les critiques de Lucas permettront peut-être à Disney et Lucasfilm d'explorer de nouvelles pistes et de prendre de plus grands risques. Bref d'innover plutôt que de rester dans l'aire de jeu conçue par Lucas. Au moins faut-il leur accorder, tout comme à J.J. Abrams, le crédit d'avoir relancé une saga dont la popularité reste intacte.


Anderton


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