En DVD et Blu-ray : En 2003, Ettore Scola avait dit qu'on ne l'y reprendrait plus : avec La Gente di Roma, il arrêtait le cinéma. C'était sans compter sur la persévérance de ses enfants et de ses proches. Dix ans plus tard, à 82 ans, le voici de retour aux affaires avec Qu'il est étrange de s'appeler Federico, titre emprunté à Garcia Lorca, et qu'édite Carlotta en vidéo. Non pour signer une oeuvre nostalgique et funèbre, avec quelques relents d'aigreur, comme avait pu l'être son évocation des heures de gloire du cinéma italien Splendor (1989), mais tout le contraire : une ode resplendissante, festive et joyeuse, un hymne au cinéma, à travers la figure tutélaire de celui qui fut son mentor et son ami, Federico Fellini.
Une formidable post-scriptum de la part d'Ettore Scola à son œuvre pourtant pléthorique, un peu mésestimée de nos jours.
Invocation à la magie du cinéma
Entre documentaire et fiction, ce qui n'aurait pu être qu'une évocation nostalgique d'une amitié au long cours, d'ordre professionnel, mais aussi intime, commencée en 1948 au sein de la revue satirique italienne Marc Aurelio, se transforme peu à peu à une éblouissante invocation à la magie du cinéma, capable de sortir des limbes une histoire oubliée, de restituer une atmosphère qui appartient au passé, de redonner vie à un personnage finalement mal connu, et un peu oublié, comme l'ont montré récemment les événements qui ont entouré le 20e anniversaire de sa disparition.
Tout Scola en un seul film
Surtout s'y fait jour le propre du talent de Scola : sa faculté à raconter un récit intime inscrit dans l'Histoire – Nous nous sommes autant aimés ou Une Journée particulière – à faire vivre une toile de fond historique à travers des événements de micro-histoire, voire de la fiction – La Nuit de Varennes – à évoquer le passage du temps et ses effets sur un microcosme – La Famille ou La Terrasse – le tout en s'appuyant sur les artifices du cinéma et du théâtre (alternance couleurs et noir & blanc, décors amovibles) comme il les avait portés à incandescence dans Le Bal.
Sans oublier son phénoménal sens du portrait, qu'il doit à sa formation de caricaturiste – qu'on se souvienne de Affreux, sales et méchants, ou du sketch Comme une reine dans Les Nouveaux Monstres. Toutes ces qualités, on les retrouve condensées dans cet essai cinématographique, jubilatoire pour les amoureux de Scola, de Fellini, du cinéma italien. Et du cinéma tout court.
Pour les amoureux du cinéma
Epaulé à la lumière par le grand Luciano Tovoli (Suspiria, Profession:Reporter), le cinéaste redonne vie aux plus grandes heures du cinéma italien, à ses acteurs – revoir les essais de Sordi, Tognazzi et Gassman pour le rôle de Casanova de Fellini est un grand moment, surtout quand on sait que le maestro avait refusé d'auditionner Mastroianni, lequel interpréta quelques années plus tard le rôle dans La Nuit de Varennes, signée... Ettore Scola ! - à ses maîtres, mais aussi à son lieu emblématique : Cinecitta, qui à maintes reprises donne lieu à de magnifiques moments d'illusion, de magie et de poésie.
Bref, n'hésitez pas à arpenter les sentiers de la mémoire de Scola, qui signe là son Amarcord.
Travis Bickle
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