En Blu-ray : Une jeune fille quitte l'école en courant. Cartable à la main, corsage déchiré, le visage en pleurs. Elle traverse tout le village pour finir par se cloîtrer dans sa chambre devant ses parents stupéfaits. C'est par ce long et superbe plan séquence que débute Les Risques du métier (1967), désormais disponible en Blu-ray.
L'écolière accuse l'instituteur de lui avoir fait des attouchements. Ce qu'il dément formellement. Pendant l'enquête de police, ce sont à nouveau deux filles qui affirment avoir été violées par leur maître. Jeté en prison, ce dernier clame son innocence, avec le soutien inébranlable de son épouse. Tiré d'un livre reposant sur une histoire vraie, Les Risques du métier est un film qui n'a pas pris une ride. Ce genre d'affaires fait régulièrement la Une de l'actualité et, La Chasse l'a encore illustré récemment, un homme accusé de pédophilie peut-il encore se défendre, notamment vis-à-vis de l'opinion publique ?
La première du Grand Jacques
Le sujet est délicat et il fallait le talent d'André Cayatte, avocat de formation, pour ne pas verser dans la caricature. Dans un beau petit village français, qui semble tout droit sortie de Jour de Fête, le cinéaste met en lumière une société française paternaliste, archaïque, oppressante. Une société qui broie les individus. Une société qui sent le moisi. La mise en scène est sobre mais efficace, avec quelques beaux plans, comme celui qui introduit le film.
Ce drame aux accents de film policier est porté par les acteurs. Tout d'abord, Jacques Brel qui, pour son premier rôle au cinéma, incarne un brave type qui se retrouve embarqué dans une affaire qui le dépasse. Son jeu naturaliste fait merveille. On prend fait et cause pour cet instituteur abattu mais pas complètement à terre. A ses côtés, dans le rôle de son épouse : Emmanuelle Riva qui, à l'inverse, propose un jeu très théâtral, un peu en décalage avec le ton réaliste du film. Mais elle est formidable. Tout comme Nathalie Nell et Delphine Desyeux, les jeunes filles qui interprétent les écolières : dans leurs grands yeux humides, parfois inquiétants, elles font passer toute l'ambiguïté d'adolescentes qui deviennent femmes.
On les retrouve dans un beau bonus où elles évoquent le tournage et leurs rapports avec Brel et Cayatte, le premier un peu timide, le second pas toujours commode. On retrouve d'ailleurs les deux hommes dans des interviews d'époque. Le Grand Jacques y fait part de son approche du rôle, avec doutes et humilité. Encore une belle édition signée Gaumont.
Anderton
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