Artistes : Les Cinéastes des années 80 (découvrez notre dossier) sur OCS Géants, ça continue ! Ce samedi à 22h20, focus sur celui que l'on a désigné comme l'héritier de Sam Peckinpah : Walter Hill. Interviewé par Jean-Pierre Lavoignat et Christophe d'Yvoire, le cinéaste les reçoit dans son manoir de Beverly Hills, les cheveux et le bouc blanchi par les années, en jean, tout de noir vêtu, lunettes comprises, en raison d'une fragilité oculaire.
Après des débuts tendus, l'entretien se relâche. A un point tel que le cinéaste viril et testostéroné des Guerriers de la nuit avoue que l'un de ses films cultes est Les Parapluies de Cherbourg ! Et qu'il ne peut s'empêcher de lâcher un silence lourd de sous-entendus et d'émotions à l'évocation du décès de son père pendant le tournage de Crossroads (1986), le film-hommage qu'il a consacré au blues et à Robert Johnson en particulier. Mais au fait, c'est qui, Walter Hill dans les années 80 ?
Car au fil de l'entretien, Walter Hill se révèle à la fois un inconditionnel du grand cinéma classique hollywoodien - Raoul Walsh, Howard Hawks et John Ford, "Je doute que les films de ma génération ou ceux de de l'actuelle soient meilleurs que ceux de nos aînés", déclare-t-il – tout en prenant plaisir à démythifier les valeurs américaines : "On dit toujours que je fais un cinéma masculin. Mais on omet toujours de dire que je montre que ça ne fonctionne pas toujours très bien !". Fasciné par le courage, la lutte et le primitif en l'être humain, il reste un très grand directeur d'acteurs – Nick Nolte, Eddie Murphy, Keith Carradine, Willem Dafoe, Mickey Rourke – et un observateur, un brin mélancolique sur le Hollywood contemporain : "Nos séries B sont devenues des séries A".
Focus sur les années 80 d'un petit maître qui n'a peut-être pas réussi à détrôner ses aînés, mais est parvenu à s'inscrire durablement dans la mémoire des cinéphiles et des amateurs du film de genre.
Les Guerriers de la Nuit (The Warriors, 1979)
Qualifiée par le cinéaste de "version stylisée d'un récit mythologique grec", Les Guerriers de la Nuit frappent par leur vigueur graphique et stylistique. Ce western urbain qui voit s'affronter plusieurs bandes dans le Bronx reste un modèle du genre. Enorme scandale à sa sortie, en raison de sa supposée apologie de la violence, il est interdit aux moins de 18 ans en France.
Le Gang des frères James (The Long Riders, 1980)
Tourné en même temps que Heaven's Gate de Michael Cimino, ce western sous influence Peckinpah, a pour particularité d'être interprété par des fratries de cinéma – les Quaid, Carradine et Keach – pour raconter l'affrontement entre les fratries James, Miller et Younger. C'est aussi la première des neuf collaborations du réalisateur avec le musicien Ry Cooder. Sélection officielle à Cannes en 1980, s'il vous plaît.
Sans retour (Southern Comfort, 1982)
A la fois métaphore du Vietnam et pur survival dans le bayou, Sans Retour est peut-être le meilleur film de Walter Hill. Peut-être celui où il dévoile le plus sa conception de l'humanité, à la fois bestiale et empreinte de religiosité primitive. On n'est pas loin de Délivrance.
48 heures (48 Hours, 1982)
Véritable hit au B.O., le film lance à la fois la carrière d'Eddie Murphy au cinéma – déjà très célèbre en raison de ses participations au Saturday Night Live – et la vogue de buddy movies. Mélange de film d'action et de comédie, c'est peut-être le plus jouissif de tous les films de son réalisateur. Et puis, entendre Eddie Murphy chanter Roxanne à tue-tête...
Les Rues de feu (Streets of Fire, 1984)
A mi-chemin du film d'action à la Guerriers de la Nuit et de la comédie musicale à la West Side Story, Les Rues de feu constitue une tentative pas totalement aboutie de marier les genres. Reste au bout du compte un témoignage unique du style des années 80, du meilleur (le montage) comme pour le pire (les costumes) !
Comment claquer un million de dollars par jour (Brewster's Millions, 1985)
Tentative totalement ratée du cinéaste d'aborder la comédie, dans le sillage de John Landis avec Un fauteuil pour deux. Mais Richard Pryor était déjà bien mal en point, John Candy, loin du brio de Dan Ackroyd, et Walter Hill peu à l'aise avec ce genre.
Crossroads (1986)
"J'aime la musique, j'aime le blues. Mais je ne crois pas avoir eu la sensibilité adéquate pour ce film.". Une des raisons qui expliquent qu'il ne soit jamais sorti en France ? On aurait pourtant aimé le voir, pour son récit d'initiation et de transmission, son évocation du blues et de Robert Johnson.
Extrême préjudice (Extreme Prejudice, 1987)
Néo-western situé au Nouveau-Mexique, Extrême préjudice ressemble comme deux gouttes d'eau à un film de... Sam Peckinpah : ralentis, jaillissements de violence, climat moite et lourd de tensions, scorpions au coin de rue, duel fratricide entre un représentant de la loi et un trafiquant, le film a tout pour devenir un étalon du genre, et pourtant, ça ne prend pas complètement. La faute au scénario pourtant signé John Milius, trop référencé ? Reste un affrontement entre deux acteurs fétiches du cinéaste, Powers Boothe – sur lequel Walter Hill ne tarit pas d'éloges dans le documentaire – et Nick Nolte, qu'on ne présente plus. "J'ai eu beaucoup de chance avec les acteurs", reconnaît-il.
Double détente (Red Heat, 1988)
Schwarzie dans un buddy-movie au temps de la Perestroika. Rien de spécial à dire, si ce n'est que le film assure son objectif : faire rire et vibrer à la fois.
Johnny belle gueule (Johnny Handsome, 1989)
Bien que film de commande, on sent Walter Hill extrêmement attaché au film, comme une sorte d'hommage aux productions de la Warner des années 30, interprétées par James Cagney. Dans ce polar poisseux et désespérant, Mickey Rourke trouve un de ses derniers grands rôles de la décennie, tandis que que la carrière cinéma de Walter Hill s'éteint peu à peu, à la suite d'échecs commerciaux en série – Géronimo, Wild Bill ou Supernova.
Et vous, quel est votre Walter Hill préféré ?
Travis Bickle
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire