Artistes : Honoré d'un Lion d'or pour l'ensemble de sa carrière à la Mostra 2016, Jean-Paul Belmondo méritait bien une rétro. En vidéos, s'il vous plaît. Dans cette quatrième partie, intéressons-nous à ses films à l'américaine. Les bons, comme les mauvais, quitte à susciter le débat à Cineblogywood.
Gros moyens, solides partenaires, réalisateurs aguerris (Verneuil, Deray, Lautner…), scénario destinés à plaire au plus grand nombre, tels sont les ingrédients d’une recette qui portera l’acteur au firmament du box office. Et parfois, au détriment des cinéphiles. Demeurent néanmoins dans cette liste des films qui ont fait les beaux jours du cinéma du dimanche soir.
LES FILMS A GARDER
100.000 dollars au soleil (1964), d’Henri Verneuil. Bébel, Lino Ventura, Bernard Blier, le désert marocain, les amitiés viriles... Tollé général car le film représente la France en compétition officielle au Festival de Cannes 1964. Sorte de western avec des camions en lieu et place des chevaux, devenu un classique populaire.
Week-end à Zuydcoote (1964) d’Henri Verneuil, d’après le roman de Robert Merle. Grosse production située pendant le débarquement anglais de Dunkerque en 1940, dans laquelle Belmondo incarne un personnage plus adulte que d’accoutumée.
Borsalino (1970). Evocation de la pègre marseillaise des années 30, Borsalino reste un must pour son affrontement Delon-Belmondo, et la polémique juridique qui l’accompagna, Belmondo s’estimant floué contractuellement par rapport à l’affiche. Une brouille entre les deux acteurs qui prendra fin en 1997, sous la caméra de Patrice Leconte dans Une Chance pour deux.
Le Casse (1970). Partie de cache-cache entre un flic retors et un cambrioleur rusé, Le Casse, signé Henri Verneuil, dénature le roman dont il est adapté, signé David Goodis. Reste un solide film d’action, et un face à face Belmondo-Omar Sharif qui a fait les beaux jours du B.O.
Peur sur la ville (1975). Belmondo fait son inspecteur Harry sur les traces d’un tueur en série. Encore Verneuil, des cascades à tout va, une musique de Morricone, mouais... Ca passe, un peu.
LES FILMS A JETER
Les Morfalous, Flic ou voyou, Le Guignolo, Le Professionnel, L’As des as, Le Marginal, Joyeuses Pâques, Hold-Up, Le Solitaire – le film de trop... Malgré le professionnalisme de leurs réalisateurs (Deray, Verneuil, Oury...), leurs castings souvent impressionnants (Galabru, Marielle, Marceau, Villeret...), pas un de ces films tournés dans les années 80 ne supporte une vision aujourd’hui. Tout entiers fabriqués à la gloire de l’acteur, ils peuvent être vus comme l’apogée du star système à la française et réalisés sans aucun souci esthétique. Je sais, je ne vais pas me faire que des amis ! Mais reconnaissons-le : Belmondo l’acteur a totalement disparu au profit du cascadeur et du businessman. Il est loin le temps du Voleur ou du Doulos...
La réponse d'Anderton :
Pas complètement d'accord avec l'ami Travis ! Oui, sous la houlette de René Chateau, Belmondo devient une marque qui s'écrit en énormes lettres sur les affiches. D'ailleurs on ne voit que l'acteur sur ces affiches. Le public court chaque année en salles pour aller voir "le nouveau Bébel". Mais dans ces films des années 80, tout n'est pas à jeter.
Flic ou Voyou (1979). Film génial dans lequel Bébel fait du Bébel : grosses blagues, cascades (réalisées avec l'aide des fidèles Guy Carliez et Rémy Julienne) et roulage de mécaniques. Beau casting. Les dialogues d'Audiard font mouche. Georges Lautner signe une mise en scène, on va dire, efficace, avec quelques plans de toute beauté, comme celui où Bébel fend la nuit dans sa décapotable, long foulard au vent. Mais, sous la Belmonderie, il y a une noirceur qui traverse le film. Exubérance et gravité qui se retrouvent dans la sublime partition de Philippe Sarde, mêlant classique et jazz - ces envolées de violons à laquelle répond la trompette mélancolique de Chet Baker...
Le Professionnel inaugure le cycle des films (Le Marginal, Le Solitaire) dans lequel Bébel la joue premier degré et se prend trop au sérieux. Tout le monde s'efface derrière la stature du commandeur (jeu de mots, comme dirait Maître Capello), réalisateurs compris. Du coup, les films vieillissent mal. Et puis, impossible d'écouter Chi Mai de Morricone sans penser à la pub Royal Canin.
Même coup de vieux pour Les Morfalous, malgré quelques répliques cultes d'Audiard (un type pisse sur un fil électrique et meurt sur le coup. Commentaire de sa femme : "C'est bien la première fois qu'il fait des étincelles avec sa bite"). Il manque un supplément d'âme. Hold-Up, le plus nord-américain de la série puisque tourné au Québec, est franchement raté même si on y voit Kim Cattrall (Police Academy, Sex in the City) à poil.
Après, je dois dire que j'ai un petit faible pour Le Guignolo, foutraque, pas complètement réussi mais loin d'être raté, qui mélange film d'espionnage et vaudeville. Avec la désormais incontournable cascade de Bébel, suspendu en caleçon à pois et haut-de-forme à un trapèze lui-même relié à un hélicoptère qui survole Venise en plein hiver. La photo est moche, la mise en scène inexistante et la cascade complètement gratuite. Mais Audiard continue de distiller quelques vannes qui claquent, il y a une tripotée de seconds rôles comme on les aime (Galabru, Géret, Beaune, Vernier, Castelli, Gérard, Luisi...), Carla Romanelli est flamboyante et sexy. Particularité : Bébel fait l'amour à une espionne noire, revêtue d'une simple culotte. Une des rares relations sexuelles interraciales représentées dans le cinéma français.
Même sympathie pour L'As des As (qui a probablement été vu par Spielberg avant qu'il fasse Indiana Jones et la Dernière croisade) et Joyeuses Pâques, dont les défauts sautent aux yeux mais que j'ai souvent vus, comme les autres, sur le magnétoscope familial. A part Flic ou Voyou, je n'ai pas revu ces films depuis des années. Pas sûr qu'ils passent la cruelle épreuve du temps mais ils sont en moi, à jamais.
Demain, dernière partie de notre rétrospective : les chefs d'oeuvres et les nanars !
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