mardi 17 octobre 2017

The Square : une Palme d'Or qui grince (et coince)

En salles : Cinquième film du nouvel espoir du cinéma suédois, Ruben Östlund, The Square, Palme d’Or surprise du Festival de Cannes 2017, succède à Snow Therapy, radioscopie mordante d’une famille en déliquescence, sur fond de vacances au ski dans les Alpes, dont nous avions vanté les qualités. Avec The Square, le cinéaste suédois, qui offre à son pays sa deuxième Palme d’Or depuis Mademoiselle Julie en 1961, livre une satire grinçante sur le monde (et l’art) contemporain, qui évoque à la fois Michael Haneke version Code inconnu, et Paolo Sorrentino, dans ses mauvais jours.


Bonheur et altruisme, sauf que...

Alors qu’il prépare une nouvelle exposition intitulée The Square pour le Royal Museum de
Stockholm, son directeur Christian Juel Nielsen se trouve confronté à une série d’événements en cascade qui font suite à la disparition de son smartphone. Ce qui va peu à peu l’obliger à porter un autre regard sur son environnement artistique, et plus généralement sur l’humanité et le monde contemporain. Certes, la définition de ce fameux Square stipule que le carré est "un sanctuaire où règne le bonheur et l’altruisme, et dans lequel tout le monde a des droits". Sauf que...
 
Provoquer et mettre mal à l’aise
 
Cinéaste révélé en France il y a 3 ans avec Snow Therapy, prix du jury Un certain regard, Ruben Östlund avait auparavant fait parler de lui en Suède avec Play, film sans complaisance sur le racisme en Suède, et taxé de raciste ! Provoquer, mettre mal à l’aise est un de ses points forts, qu’on retrouve à de nombreuses reprises dans cette satire de l’European way of life, qui se complaît dans un cadre propice au bonheur et à l’altruisme, mais où ne sévissent qu’égoïsme et repli sur soi. Combien de fois entend-on les personnages réclamer de l’aide sans être suivie d’effets ?



Formellement audacieux, dans le sillon de Buñuel
 
Moraliste, Ruben Östlund l’est assurément, à la manière du Michael Haneke de Code inconnu ou de Caché. Mais il se montre formellement audacieux, à l’instar de la scène du dîner de gala perturbé par un performeur se comportant comme un chimpanzé, à la fois irruption de la bestialité dans l’univers policé de la haute bourgeoisie et petit théâtre de cruauté, aussi dérangeante que chez Buñuel ou Lars von Trier. Et qui constitue une véritable prouesse technique, car tournée en plan-séquence. Autre séquence marquante, qui a donné lieu à de véritables éclats de rire à Cannes : une scène de sexe entre le héros et une journaliste américaine, qui s’achève sur un pugilat infantile à propos... du préservatif qui vient d’être utilisé ! Et l’irruption incongrue d’un chimpanzé quasi dans la chambre à coucher.

Les moins
 
Cela dit, à la manière d’un Sorrentino des mauvais jours – Youth, par exemple, le cinéaste verse parfois dans la complaisance, la gratuité et la répétition, en raison de leurs goûts communs pour la déliquescence et la dégénérescence. Enfin, côté acteurs, petite déception : les amateurs de séries reconnaîtront Dominic West – The Affair – et Elizabeth Moss – Mad Men.  – mais dans des rôles secondaires. Saluons la prestation du charismatique acteur danois Claes Bang dans le rôle du commissaire de l’exposition, qui crève l’écran. A un point tel que la rumeur le place en pole position pour endosser le smoking de James Bond pour succéder à Daniel Craig.
 
Travis Bickle

 

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