En salles : Après son monumental Vincere, Marco Bellocchio revient pour ausculter l’Italie contemporaine. Pour livrer une œuvre plus secrète, plus mystérieuse, mais totalement en phase avec son style si particulier. Qui l’apparente à une sorte de Buñuel italien. Car en s’attaquant aux piliers de la société italienne (famille, religion, politique, médecine) avec un regard féroce et sarcastique, il rappelle par bien des aspects le maître espagnol.
Fait divers marquant
La Belle endormie a pour toile de fond l’un des événements les plus marquants de l’Italie berlusconienne : la polémique qui a suivi la décision de la justice italienne d’autoriser la famille d’une jeune fille plongée dans le coma depuis 17 ans, Eluana Englaro, à interrompre son maintien en vie artificielle, en novembre 2008.
6 jours, 4 personnages, 1 requiem
Construit comme un quasi-requiem sur les 6 jours précédant le décès d’Eluana, le film suit la destinée de 4 personnages emblématiques des débats de fond et cas de conscience qui secouent alors l’Italie : un sénateur tiraillé entre sa liberté de conscience et la discipline de vote du parti auquel il appartient ; sa fille, pro-life, qui aura une aventure avec un bel inconnu issu du camp opposé ; une droguée suicidaire, recueillie et in fine, sauvée d’un ultime saut dans le vide par un médecin compatissant et hors normes ; enfin, une diva, recluse dans son palazzio, sombrant dans une folie douce pour préserver sa fille elle-même plongée dans le coma.
Magistrale démonstration de mise en scène
Film choral à la Altman (avec notamment pour interprètes Toni Servillo et Isabelle Huppert), fresque sur le berluconisme déclinant, La Belle endormie ne se satisfait pas d’une trame réductible à des oppositions binaires : pro-life contre laïcs, Berlusconi contre la gauche, vieux contre jeunes, politiques contre citoyens. Tel un catalyseur d’opinions, Bellochio ballade – et de quelle manière ! – sa caméra à travers les couloirs d’un palazzio, les bas-fonds de la République, les recoins d’une chambre d’hôpital pour y débusquer les doutes et les désarrois d’un pays en crise d’identité. Magistral travail de mise en scène et de montage, où les partis pris esthétiques (il faudrait parler ici du rôle de la musique qui distille un climat funèbre) traduisent bien mieux qu’un long discours un état des lieux sociétal et politique, marqué par l’anesthésie et le déni.
Final à vous arracher une larme
Avec un regard d’une lucidité et d’une férocité proches du Sourire de ma mère, Bellochio aurait pu sombrer dans un discours convenu de détestation du présent. Or il achève son film sur une note d’optimisme à vous arracher une larme totalement inattendue. Complètement tourné sur l’avenir, loin de se contenter d’une critique féroce du berlusconisme, avec La Belle endormie, Bellochio fait preuve in fine d’une bienveillance inaccoutumée à l’égard des individus. Bref, un très beau film, emblématique de son auteur, qui ausculte avec précision et sans concessions l’Italie contemporaine, mais avec une ultime et bienvenue bienveillance. Et si Bellochio était le prince charmant de cette Italie au bois dormant ?
6 jours, 4 personnages, 1 requiem
Construit comme un quasi-requiem sur les 6 jours précédant le décès d’Eluana, le film suit la destinée de 4 personnages emblématiques des débats de fond et cas de conscience qui secouent alors l’Italie : un sénateur tiraillé entre sa liberté de conscience et la discipline de vote du parti auquel il appartient ; sa fille, pro-life, qui aura une aventure avec un bel inconnu issu du camp opposé ; une droguée suicidaire, recueillie et in fine, sauvée d’un ultime saut dans le vide par un médecin compatissant et hors normes ; enfin, une diva, recluse dans son palazzio, sombrant dans une folie douce pour préserver sa fille elle-même plongée dans le coma.
Magistrale démonstration de mise en scène
Film choral à la Altman (avec notamment pour interprètes Toni Servillo et Isabelle Huppert), fresque sur le berluconisme déclinant, La Belle endormie ne se satisfait pas d’une trame réductible à des oppositions binaires : pro-life contre laïcs, Berlusconi contre la gauche, vieux contre jeunes, politiques contre citoyens. Tel un catalyseur d’opinions, Bellochio ballade – et de quelle manière ! – sa caméra à travers les couloirs d’un palazzio, les bas-fonds de la République, les recoins d’une chambre d’hôpital pour y débusquer les doutes et les désarrois d’un pays en crise d’identité. Magistral travail de mise en scène et de montage, où les partis pris esthétiques (il faudrait parler ici du rôle de la musique qui distille un climat funèbre) traduisent bien mieux qu’un long discours un état des lieux sociétal et politique, marqué par l’anesthésie et le déni.
Final à vous arracher une larme
Avec un regard d’une lucidité et d’une férocité proches du Sourire de ma mère, Bellochio aurait pu sombrer dans un discours convenu de détestation du présent. Or il achève son film sur une note d’optimisme à vous arracher une larme totalement inattendue. Complètement tourné sur l’avenir, loin de se contenter d’une critique féroce du berlusconisme, avec La Belle endormie, Bellochio fait preuve in fine d’une bienveillance inaccoutumée à l’égard des individus. Bref, un très beau film, emblématique de son auteur, qui ausculte avec précision et sans concessions l’Italie contemporaine, mais avec une ultime et bienvenue bienveillance. Et si Bellochio était le prince charmant de cette Italie au bois dormant ?
Travis Bickle
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