En DVD et Blu-ray : Ironie de l'histoire. La semaine où Donald Trump est élu président des Etats-Unis, sort en vidéo Desierto de Jonas Cuaron, avec Gael Garcia Bernal et Jeffrey Dean Morgan. Alors que le premier veut construire un mur entre les Etats-Unis et le Mexique, le film raconte la traque par un redneck de clandestins ayant passé la frontière. Un thriller politique !
Politique, oui. Comment pourrait-il en être autrement ? Un groupe de Latino-américains, emmené par des passeurs dont le camion est tombé en panne en plein désert, est pourchassé par un Américain solitaire. Dans son pick-up, sur lequel flotte un petit drapeau confédéré : un chien d'attaque, un fusil à lunettes et une bouteille de whisky. Un cocktail explosif. Le personnage aurait pu être caricatural mais Jonas Cuaron, qui, outre la réalisation, a cosigné le scénario, a évité d'en faire le monstre froid et implacable que l'on retrouve (trop) souvent dans les survivals. Le redneck en question noie dans l'alcool sa solitude, sa haine du désert, sa haine de soi... Formidable interprétation de Jeffrey Dean Morgan, qui parvient à nous émouvoir alors même que son personnage est un salaud de première. En voyant ce type, dont la vie semble se résumer à sa bagnole, à son chien et aux immensités désertiques, je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Mad Max. Un Mad Max époque Road Warrior mais sans la petite étincelle d'humanité qui brillait sous la peau burinée et les vêtements poussiéreux.
Loin des statistiques
Ses victimes : des pauvres gens venus chercher l'Eldorado chez l'Oncle Sam. Des couples, des jeunes, des moins jeunes - pas tous sympathiques d'ailleurs. Aucun angélisme dans cette histoire. Et puis, il y a le personnage interprété par Gael Garcia Bernal. On comprend qu'il s'y connaît un peu en mécanique, on apprend qu'il s'est fait reconduire à la frontière et qu'il a décidé de la retraverser pour rejoindre sa femme et son enfant restés aux States. Un drame banal que ne disent pas les statistiques sur l'immigration illégale. L'acteur mexicain n'en rajoute pas des tonnes. Il joue la peur, il joue la détermination, il dévoile son personnage par les regards et par ses aptitudes physiques. Pas spécialement courageux, pas spécialement costaud mais porté par des valeurs, un fort instinct de survie et beaucoup d'ingéniosité. Contrairement au "chasseur" et à certains de ses compagnons de route, il n'abandonne jamais sa part d'humanité. Le désert est souvent un lieu de révélations - en témoignent les écrits des trois grandes religions monothéistes. Dans Desierto, les protagonistes se révèlent être des salauds... ou des héros.
Ce paysage minéral, Cuaron le filme en plans larges, qu'il fait durer. Tout semble hostile. Mort. La photo est magnifique et la musique, composée par Woodkid, souligne parfaitement l'étrangeté du décor. L'édition Blu-ray de Condor Entertainment met en valeur l'une comme l'autre. Un petit regret : l'absence de bonus. Reste que si le sous-texte est résolument politique, Cuaron n'a pas réalisé un film à message. Le récit est prenant, avec son lot de rebondissements. Toujours au plus près des personnages. Coproduit par Alfonso Cuaron (le père de), Desierto démontre une nouvelle fois l'inventivité des cinéastes mexicains.
Anderton
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