mardi 17 février 2015

Kingsman Services Secrets : Colin Firth et Matthew Vaughn s'expliquent

 
En salles : Kingsman Services Secrets sort demain sur nos écrans. Marcel Martial vous en a déjà dit beaucoup de bien (lire : Kingsman - Save the focking date !). Le 4 février dernier, Cineblogywood a été invité, comme d'autres blogueurs, à une nouvelle projection du film, suivie d'une série de questions-réponses avec Matthew Vaughn, le réalisateur, et Colin Firth, l'acteur principal. Retour sur le film, à la lumière des commentaires de ces deux talents.
 
En préambule, petit rappel de l'histoire : Eggsy, dix-neuf ans, habite un quartier mal famé de Londres. En garde à vue pour un vol de voiture, il fait appelle à Harry Hart (Firth), un ancien collègue de son défunt père. Grand, brun, élégant, Harry voit le potentiel gâché de ce jeune homme, et lui permet de faire ses preuves au sein de Kingsman, un centre d’espionnage privé, au dessus des conflits d’Etats. Commence alors l’entretien d’embauche le plus périlleux de l’histoire du cinéma : une compétition de jeunes candidats dans l’enceinte même des services secrets. Entre James Bond et Austin Power, Kingsman est une comédie d’espionnage drôle et palpitante à la fois.
 
"Si chacun avait des bonnes manières, le monde serait un bien meilleur endroit à vivre", a précisé Matthew Vaughn (Kick Ass, X-Men - Le commencement). Kingsman, c’est effectivement une mise en scène du gentleman à l’anglaise. Tourné à Londres, le film est une coproduction anglo-américaine, qui donne effectivement une vision biaisée de l’Angleterre et du fameux gentleman. Une vision fantasmée, élevée à un degré de spectacularisation qui confine à l’absurde. Loin d’être vulgaire, le décalage permanent entre la discrétion du gentleman, et la mise en scène de ce dernier (un découpage à la machette des films d’action américains), est au contraire le moteur comique du film.
 
 
Lectures adultes et frustrations

Combats chorégraphiés, gadgets, explosion multicolore, paysages éblouissants... Matthew Vaughn ne recule devant aucune extravagance pour recréer le monde haut en couleurs de la bande dessinée de Dave Gibbons et Mark Millar, Services Secrets (2012). Lors de la projection, Colin Firth ironise sur les lectures dites "adultes", en affirmant ne lire que des livres sérieux qui l’ennuient, par opposition aux bandes dessinées comme Services Secrets, qui recèlent de rêves d’enfance. Et d'indiquer : "Je n'ai pas lu de BD depuis mes vingt ans".
 
Matthew Vaughn quant à lui, affirme que l’idée du film est née d’une frustration face aux films d’espionnage de son enfance, des années 70 : il voulait dans ce film rendre possibles tous les gags imaginables, et sortir d’un schéma classique. Des répliques bien senties aux folies architecturales du siège de Kingsman, toutes les composantes du film convergent effectivement vers cette douce absurdité qui rappelle l’univers enfantin, et forme une trame homogène tout aussi divertissante qu’entraînante. Pour créer cette atmosphère fantasque, Matthew Vaughn fit face à un énorme travail de préparation, qui inclut des combats chorégraphiés, calculés à la seconde près, pour lesquels Colin Firth suivit six mois d’entraînement. Le but du réalisateur était de faire de ces combats de véritables histoires avec une unité narrative propre. Davantage des ballets, que des scènes de violence.

Le diable mange chez McDonald’s
Par ses multiples supports et sources d’inspiration, Kingsman est un pur produit de notre culture, ce dont joue le film en multipliant les références aux films d’espionnage et personnages emblématiques comme James Bond ou Arsène Lupin, le gentleman voleur. Bien connus du grand public, les personnages de films d’espionnage servent de sources d’inspiration mais aussi de dépassement à ceux de Kingsman. Ainsi, Valentine (Samuel L. Jackson) prend le contrepied du "méchant" habituel, mystérieux et taciturne : un milliardaire hyper médiatisé à la carrure de basketteur, une casquette des Yankees sur le crâne et le sourire aux lèvres, se nourrissant exclusivement chez McDonald’s. Pour créer un malaise comique autour de ce personnage sympathique mais dangereux, Jackson s’invente un zozotement : il fallait selon lui une faille à ce milliardaire, une faiblesse du passé.
 
Tous différents, les personnages sont autant de touches de couleurs réparties sur une toile bien huilée. Très caractérisés, souvent à outrance, ils interagissent sans surprise mais amènent tous une valeur ajoutée au déroulement de la narration. La distribution illustre parfaitement ce tableau hétéroclite, ainsi que le décalage comique du gentleman avec le monde extérieur, en opposant Samuel L. Jackson à Colin Firth, l’univers branché américain ne jurant que par les marques, et l’élégance à l’anglaise, un peu désuète. Au second plan, Michael Caine et Taron Egerton (Testament of Youth, James Kent), un jeune acteur jusqu’alors inconnu du grand public. Selon le réalisateur, c’est un des objectifs du film, tant dans la narration que dans la distribution, de "donner l’opportunité à la jeunesse de faire part de ce monde, et de le créer à son image". Ce choix illustre selon lui sa volonté de renouveler une génération d’acteur avec des nouveaux talents méritants. Mais au-delà du casting, Kingsman mène une vraie réflexion sur le futur, et surtout, notre manière de l’aborder.
 
Technologie et fin de cycle

Comme toute arme, la technologie peut défendre... et tuer. Ainsi, Valentine met au point un plan machiavélique s’inspirant des théories de Darwin pour façonner le monde à son image. Pour se faire, il utilise la popularité et l’intérêt médiatique dont jouissent les nouvelles technologies. Tant pour concrétiser ce plan que dans la vie quotidienne des Kingsman, la technologie joue un rôle primordial : elle permet aux individus de dépasser les barrières de physique, devenir omniscient et opérationnel, devenir un héros. Comme il le précise lors de la projection, Matthew Vaughn ne rejette pas ces dernières, loin de là, mais prône une utilisation prudente et intelligente de ces nouveaux outils. "la technologie peut sauver le monde, nous avons juste à l'accepter", dit-il. Arme de destruction massive ou de salut, le film construit en filigrane une réflexion intéressante sur notre rapport à la modernité.
 
Pas d’intrigue tordue ou de jeux de mots élitistes, Kingsman est un film accessible et élégant qui a tout d’un gentleman. "Un vrai gentleman met les autres personnes à l'aise", explique Vaughn. Haut en couleurs, en suspense et en humour, il clôt selon le cinéaste une partie de sa carrière. Car ses projets à venir sont tout autres : une comédie musicale, peut-être un drame... Il souhaite désormais évoluer sur d’autres tableaux, pour continuer son apprentissage perpétuel du cinéma.
 
 Anouk 

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